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LE SERMON SUR LA CHUTE DE ROME (J. Ferrari) Fiche de lecture

Des hommes privés de monde

Car il ne s'agit pas ici d'Apocalypse : en guise d'épilogue à un récit qui, rétrospectivement, devient fable, le sermon qui donne son titre au livre est attribué à Augustin, Père de l'Église et Romain d'Afrique qui rappelle à ceux qui s'agitent, tandis que les Wisigoths détruisent son évêché d'Hippone, que la situation n'est pas grave puisqu'elle est désespérée, et que l'Éternel n'a jamais promis le bonheur, mais la seule éternité. Le sermon donne sens à l'Histoire quand elle déraille et entreprend de contrarier le bonheur des hommes. Le livre se referme avant que quelque issue ait été trouvée à cette question sans réponse. Le lecteur reste sur l'image d'êtres qui s'effacent, défaits, émasculés ou devenus fous, Eros et Thanatos s'unissant dans l'abjection et le saccage de l'idéal. Seule consolation pour lui : le polissage de ce roman d'une noirceur métaphysique extrême par une langue classique et mesurée, qui se risque aux hardiesses depuis longtemps intégrées de la modernité. La langue fluide, discrètement précieuse par endroits, observe de façon aiguë les personnages selon une forme subtile d'interpénétration qui évite le schématisme. Voilà qui mène inexorablement vers la violence finale d'une pudeur sans faille.

Il est heureux que le prix Goncourt ait retrouvé sa vocation première à travers ce roman qui redonne quelque intérêt à la littérature en se faisant délibérément lisible, et qui rappelle très classiquement que sa raison d'être est de témoigner de la condition humaine à travers le cheminement d'une écriture nomade.

— Michel P. SCHMITT

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Michel P. SCHMITT. LE SERMON SUR LA CHUTE DE ROME (J. Ferrari) - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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