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LA CHUTE, Albert Camus Fiche de lecture

Albert Camus - crédits : Kurt Hutton/ Getty Images

Albert Camus

Initialement intitulée Un héros de notre temps, La Chute devait faire partie du recueil de nouvelles L'Exil et le royaume. Albert Camus (1913-1960) semble avoir été lui-même surpris de l'expansion de son récit – écrit très vite, entre septembre 1955 et février 1956 – qui l'obligea finalement à le publier à part, chez Gallimard, en mai 1956.

Ce texte au statut générique hésitant (monologue théâtral ? court roman ? longue nouvelle ? récit autobiographique ? essai ?...) occupe une place singulière dans l'œuvre de Camus : celui-ci reçut le prix Nobel quelques mois après sa parution, et mourut prématurément quatre ans plus tard, sans avoir rien publié d'important entre-temps. Ces circonstances ont conféré à La Chute l'aura particulière d'une œuvre testament, ce qu'elle n'était nullement au départ.

Une confession calculée

Le récit s'ouvre sur une rencontre : dans un bar sordide d'Amsterdam, Jean-Baptiste Clamence, ancien avocat parisien, entreprend de faire le récit de sa vie à un interlocuteur mystérieux que nous ne verrons ni n'entendrons jamais. Le monologue, qui se développe au cours de cinq entretiens, est divisé en six parties liées à des lieux différents : le bar Mexico-City, les rues d'Amsterdam, une excursion dans l'île de Marken, le bateau de retour, et la chambre d'hôtel. Ces six parties constituent en réalité deux blocs symétriques, situés de part et d'autre d'un épisode central : un soir, sur un pont de Paris, Clamence, alors au faîte de la réussite et pétri de bonne conscience, a assisté sans intervenir au suicide d'une jeune femme. Cet événement achève de ruiner l'édifice social, intellectuel et moral déjà fissuré du personnage, qui va progressivement mettre au jour les artifices et les faux-semblants sur lesquels il était bâti. Voici comment Camus lui-même, dans son Prière d'insérer, résumait son récit : « L'homme qui parle dans La Chute se livre à une confession calculée. Réfugié à Amsterdam, dans une ville de canaux et de lumière froide, où il joue à l'ermite et au prophète, cet ancien avocat attend, dans un bar douteux, des auditeurs complaisants. Il a le cœur moderne, c'est-à-dire qu'il ne peut supporter d'être jugé. Il se dépêche donc de faire son propre procès, mais c'est pour mieux juger les autres. Le miroir dans lequel il se regarde, il finit par le tendre aux autres. Où commence la confession, où l'accusation ? celui qui parle dans ce lieu fait-il son procès, ou celui de son temps ? Est-il un cas particulier, ou l'homme du jour ? Une seule vérité en tout cas, dans ce jeu de glaces étudié : la douleur, et ce qu'elle promet. »

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Pour citer cet article

Guy BELZANE. LA CHUTE, Albert Camus - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CAMUS ALBERT (1913-1960)

    • Écrit par Jacqueline LÉVI-VALENSI
    • 2 953 mots
    • 1 média
    ...algériennes 1939-1958 ») recueille ses prises de position, et en particulier son « appel à la trêve civile », lancé à Alger en 1956 et si mal entendu. La Chute (1956), roman insolite qui prend la forme d'un monologue dramatique, est directement inspirée par ce climat d'incompréhension et d'accusation....

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