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AVERTY JEAN-CHRISTOPHE (1928-2017)

Homme de radio et réalisateur de télévision, Jean-Christophe Averty est né à Paris le 6 août1928. Son inventivité lui a permis de rejoindre, grâce à la diffusion télévisuelle, une préoccupation majeure des vidéastes : la dimension publique. Il ne s'agit pas seulement de l'impact quantitatif sur les spectateurs, mais aussi de la transformation esthétique et plastique des œuvres que celles-ci requièrent lorsqu'elles doivent passer par un média touchant un large auditoire de toutes classes et de toutes cultures. La manipulation vidéographique et électronique à laquelle Jean-Christophe Averty s'adonna à partir des années 1960 est exemplaire à cet égard. Le terme de « pionnier » n'est pas trop fort pour désigner le travail d'Averty qui, après quelques tentatives cinématographiques, commença immédiatement à travailler pour la télévision qui venait de faire sa récente apparition dans les foyers. Entré comme assistant à la RTF en 1952, devenu réalisateur en 1956, il produira plus de cinq cents émissions sur le jazz, le sport, le cirque, la mode, les variétés et surtout sur le théâtre – les dramatiques –, émissions qu'il adaptera et « mettra en page » lui-même, avec l'aide de son équipe. Non sans faire scandale, comme on l’a vu avec l’émission Les Raisins verts (1963-1964), dont l’humour « bête et méchant » choquera bien des téléspectateurs.

Au cours de l'évolution technologique de la télévision et des moyens vidéo, Jean-Christophe Averty a su non seulement s'adapter parfaitement aux contraintes techniques, mais également aller à l'encontre de toutes les conventions télévisuelles. S'il fut l'un des premiers à utiliser l'éventail de tous les trucages possibles et imaginables, l'un des premiers à faire usage de l'« incrustation » avec l'apparition de la couleur en 1967, cela n'est pas dû au hasard de la trouvaille et du bricolage. En fait, les trucages furent créés parce que Averty cherchait des formes esthétiques allant à l'encontre du réalisme et du naturalisme télévisuels, pour ne garder – à travers des centaines de plans, de collages, de citations textuelles sonores et musicales, de superpositions, de distorsions des cadrages et des mises en scène – que l'artifice de l'image construite. Mélangeant savamment les possibilités de l'électronique à d'autres modes de pensée (publicité, surréalisme, esthétique de Marcel Duchamp, opéra, bandes dessinées, typographie, radio, cinéma, etc.), il a su faire de l'art vidéographique une machine capable d'explorer simultanément le champ télévisuel proprement dit et l'imaginaire du spectateur. L'aspect technique, malgré toute son importance et l'influence qu'il peut avoir sur l'imagination, ne la précède pas réellement, puisque les images d'Averty sont construites, modulables, transformables, grâce à des processus extérieurs à la technologie audiovisuelle. Qu'il adapte des œuvres d’Alfred Jarry (Ubu roi), de Raymond Roussel (Impressions d’Afrique), de Jules Verne (Le Château des Carpathes) ou de Shakespeare (Le Songe d’une nuit d’été), qu'il s'inspire de La Revue des Deux Mondes ou de l'Oulipo, ou encore de tableaux de Bruegel, de Bosch, de Turner, de Monet ou de Magritte, Averty tient à sauvegarder dans chaque émission le caractère autonome et artificiel du média qu'il utilise ; celui-ci ne doit pas être entravé par des obstacles techniques : au contraire, non seulement il doit les dépasser, mais, si possible, créer de nouvelles problématiques tout aussi escamotables qu'un décor, de nouveaux systèmes de signes aussi foisonnants que les couleurs de l'écran.

Collectionneur de disques 78-tours, passionné de jazz et de variétés, il a animé de 1982 à 2006 l’émission[...]

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Écrit par

  • : professeur en esthétique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, critique d'art

Classification

Pour citer cet article

Jacinto LAGEIRA. AVERTY JEAN-CHRISTOPHE (1928-2017) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DABADIE JEAN-LOUP (1938-2020)

    • Écrit par Véronique MORTAIGNE
    • 1 040 mots

    Le Français Jean-Loup Dabadie fut à la fois scénariste, dialoguiste, parolier, écrivain, auteur de théâtre et de sketchs. Homme courtois, drôle et élégant, il sut manier les arts dits simples et légers, jusqu’à les mener à l’Académie française, où il fut élu en 2008 – une première pour la vénérable institution....

  • VIDÉO ART

    • Écrit par Rosalind KRAUSS, Jacinto LAGEIRA, Bénédicte RAMADE
    • 5 807 mots
    En 1965, Jean-Christophe Averty fit les premières adaptations de textes littéraires (Raymond Roussel, Alfred Jarry, Jean Cocteau...) pour la télévision, depuis lors de nombreux artistes se sont intéressés aux relations entre l’image vidéo et l’écrit, et d’abord des cinéastes comme Jean-Luc...