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LAXNESS HALLDÓR KILJAN (1902-1998)

Satire de la guerre

La trilogie Íslandsklukkan (1943-1946, La Cloche d'Islande) est une œuvre dont l'action se passe au commencement du xviiie siècle, alors que le peuple islandais subissait encore l'absolutisme danois, mais les événements historiques dont il est question sont un biais commode pour évoquer les avatars de l'Islande actuelle en face des grandes puissances qui pourraient menacer son indépendance. Le livre date de l'époque où les Islandais rompaient définitivement leurs liens avec le roi de Danemark pour fonder une nouvelle République (1944). C'est en même temps un message de victoire, l'image de la virilité et de la culture qui légitiment l'indépendance d'un si petit peuple et un message d'avertissement, un tableau de la misère qui avait accablé le peuple sous une domination étrangère maladroite. Un des héros de La Cloche d'Islande, le paysan Jón Hreggvidsson, personnage haut en couleur qui symbolise la rude énergie du peuple islandais, est condamné à mort pour avoir assassiné le gouverneur du roi, malgré l'absence de preuves. Après une fuite mouvementée, des errances et un long procès, il évite le billot grâce à l'intervention d'un savant islandais vivant à Copenhague, Arnas Arneus ; ce dernier sait quels trésors possèdent les Islandais en fait d'anciens livres ou de manuscrits. Le savant a parcouru le pays pour les rassembler et, un jour, il a pu mettre la main sur des fragments d'un précieux parchemin, précisément dans la petite ferme du paysan Jón Hreggvidsson. La comparaison s'impose avec Árni Magnússon qui parvint à rassembler l'impressionnante collection d'anciens manuscrits islandais que posséda longtemps la Bibliothèque royale de Copenhague. Laxness a adapté, en 1950, La Cloche d'Islandepour le théâtre sous le titre de Snaefrídur Íslandssól (Snaefridur, soleil d'Islande). Peu de pièces furent aussi populaires.

Dans Atómstödin (1948, Station atomique), satire un peu forcée, l'Islande non corrompue est dépeinte en la personne d'une fille de paysans, face à l'Islande pervertie par les troupes américaines.

Gerpla (1952, La Saga des Fiers-à-Bras) est à la fois une satire plus poétique et plus mordante et un long roman un peu décousu, mais souvent traversé de traits d'esprit et de moqueries sur le culte des héros et l'esprit belliqueux.

Après avoir reçu le prix Nobel de littérature en 1955, Laxness a publié des romans, Brekkukotsannáll (1957, Les Annales de Brekkukot) et Paradísarheimt (1960, Le Paradis retrouvé), qui semblent porter l'empreinte du taoïsme ; ils témoignent d'une recherche de la simplicité de la vie rurale, ainsi que la déception d'avoir cru à la terre promise invisible là où il l'attendait. Laxness a également composé nombre de nouvelles, dont quelques-unes sont des chefs-d'œuvre. Kvaedakver (1930, Poèmes) contient des poèmes alertes, influencés çà et là, par le surréalisme et le dadaïsme. Ses pièces de théâtre ont toutes été mises en scène à Reykjavik. Il y traite de la corruption de la vie politique islandaise et ridiculise la cupidité et le vide qui caractérisent la société bourgeoise d'aujourd'hui, mais sans atteindre à la même maîtrise que dans ses meilleurs romans. En outre, il a rédigé quantité d'articles, rassemblés en plusieurs volumes, sur tous les sujets possibles, souvent dans un style mordant, moqueur et vif, semblable à celui de Bernard Shaw. En 1962, Laxness a réglé ses comptes avec le communisme avec un livre de souvenirs, Skáldatími (Temps des poètes) où il commente en même temps ses poètes préférés. Ayant ajouté un volume de nouvelles en 1964, il a continué d'écrire des romans, Kristnihald undir Jökli (1968, Chrétiens du Snæfellsjökull), Innansveitarkronika (1970, Chronique de la cambrousse[...]

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Pour citer cet article

Jón ÓSKAR. LAXNESS HALLDÓR KILJAN (1902-1998) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Halldór Laxness - crédits : Schiffer-Fuchs/ ullstein bild/ Getty Images

Halldór Laxness

Autres références

  • LA CLOCHE D'ISLANDE, Halldor Kiljan Laxness - Fiche de lecture

    • Écrit par Régis BOYER
    • 666 mots

    Il n'est pas d'Islandais qui ne tienne La Cloche d'Islande (1943-1946), du Prix Nobel islandais Halldór Kiljan Laxness (1902-1998), pour le maître livre qui ait jamais été écrit dans sa langue, pourtant riche de chefs-d'œuvre de toutes sortes depuis le Moyen Âge. Au-delà des réactions...

  • ISLANDE

    • Écrit par Régis BOYER, Maurice CARREZ, Universalis, Édouard KAMINSKI, Lucien MUSSET, Claude NORDMANN
    • 16 397 mots
    • 12 médias
    ...Loftur le sorcier), quantité d'écrivains de tous ordres ont essayé de secouer le vénérable joug du fond comme de la forme. Le plus célèbre est Halldór Kiljan Laxness (1902-1998), qui soutient la comparaison avec les plus grands noms du Moyen Âge islandais aussi bien qu'avec les meilleurs écrivains...
  • SAGAS

    • Écrit par Régis BOYER
    • 3 673 mots
    ...réfugiera dans la littérature populaire, avant de refleurir à l'époque moderne sous la plume de plus d'un grand écrivain scandinave, le fleuron étant sans doute la Gerpla de HalldórLaxness qui retrouve merveilleusement le style et l'esprit de la Saga des frères jurés (Fóstbraed̄ra Saga) entre autres.

Voir aussi