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DUFLO ESTHER (1972- )

Évaluer les programmes de développement

Aux yeux d'Esther Duflo, la théorie économique ne fournit pas de réponses suffisantes à ces questions, et seule l'expérimentation peut être concluante en la matière. Avec pour premier objectif de mesurer l'efficacité des programmes de développement (éducation, santé, nourriture, microcrédit), elle utilise une méthode d'évaluation aléatoire inspirée de ce qui se pratique dans les sciences dites « dures ». Comme dans les essais cliniques, elle compare l'évolution d'un groupe témoin (qui ne bénéficie pas du programme) à un groupe d'expérience (qui en bénéficie). Elle tente de comprendre ce qui fait qu'un programme de développement fonctionne ou échoue, en se fondant sur la connaissance du terrain. Enfin, elle se charge de préconiser des actions auprès des États et des ONG, le coût initial des évaluations expérimentales étant compensé par la meilleure efficacité des programmes de développement ainsi obtenue.

Forte de sa pratique en Inde et en Afrique, Esther Duflo fonde en 2003, avec Abhijit Banerjee et Sendhil Mullainathan (deux autres professeurs du MIT), le Laboratoire d'action contre la pauvreté (le J-PAL). Le J-PAL rassemble d'abord une dizaine de personnes, mais attire rapidement de nouveaux chercheurs et les financements nécessaires à la mise en œuvre de ses projets expérimentaux. Des antennes régionales sont créées en Asie du Sud-Est, en Afrique, en Amérique latine et, en 2008, à l'École d'économie de Paris. Le J-PAL est aujourd'hui un réseau de chercheurs disséminés dans le monde entier et pilotant plus de 250 expérimentations dans une cinquantaine de pays, avec pour ambition, après la phase de « déconstruction » des présupposés sur la pauvreté, de « bâtir » une nouvelle théorie générale de la pauvreté.

Première titulaire de la chaire « Savoirs contre pauvreté » au Collège de France (2008-2009), Esther Duflo accumule les récompenses prestigieuses. En recevant la médaille John Bates Clark en 2010, elle accède à l'une des plus hautes distinctions de sa discipline. En 2019, elle reçoit le prix Nobel d’économie, conjointement à Abhijit Banerjee et Michael Kremer, pour « leur approche expérimentale de la lutte contre la pauvreté dans le monde ». Par ailleurs, elle est élue cinq ans plus tard à la présidence de l’École d’économie de Paris (Paris School of Economics, PSE).

Esther Duflo a notamment écrit, avec Abhijit Banerjee, Repenser la pauvreté (2012) et Économie utile pour des temps difficiles (2020).

— Françoise PICHON-MAMÈRE

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Françoise PICHON-MAMÈRE. DUFLO ESTHER (1972- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Esther Duflo - crédits :  Eric Fougere/ VIP Images/ Corbis/ Getty Images

Esther Duflo

Autres références

  • DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE, notion de

    • Écrit par Emmanuelle BÉNICOURT
    • 1 648 mots
    ...mesures sectorielles et ciblées. Cette évolution s'accompagne du développement des analyses dites « expérimentales » du développement – celles que mène Esther Duflo par exemple. Celles-ci visent à proposer, pour toute question concrète, la ou les mesures les plus efficaces (en termes de résultats et/ou...
  • INÉGALITÉS - Les inégalités économiques

    • Écrit par Charlotte GUÉNARD, Éric MAURIN
    • 5 370 mots
    ...dans ce domaine peuvent porter leurs fruits. Analysant en profondeur un vaste programme public de construction d'écoles nouvelles en Indonésie, Esther Duflo a mis en évidence un effet non négligeable de ce type d'investissement sur le niveau de formation des jeunes et sur leur capacité de gagner...

Voir aussi