Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ÉPICTÈSE

Propriété des cellules végétales de pratiquer une absorption supplémentaire de sels minéraux pour maintenir leur pression osmotique interne légèrement supérieure à celle du milieu. L'épictèse (du grec : ktésis, acquisition, épi, en supplément) fut découverte par le physiologiste français Lapicque en 1925 sur l'algue brune Ectocarpus. Comme il est de règle chez les végétaux, les vacuoles ont une pression osmotique (p.o.) légèrement supérieure à celle du milieu (eau de mer) ; cette hypertonie entraîne une certaine suppression du suc vacuolaire qui distend les parois (turgescence). Lapicque dépose un fragment d'Ectocarpus dans de l'eau de mer ; sa légère turgescence se manifeste par une convexité des parois transversales. Il ajoute alors du saccharose (0,4 M) ; comme prévu, l'eau sort des vacuoles et les membranes s'infléchissent vers l'intérieur, inflexion qui précède la plasmolyse proprement dite. Mais après quelques heures, la plasmolyse régresse et la turgescence reprend.

Il y a donc une rentrée d'eau, qui ne peut s'expliquer que par une élévation de la p.o. vacuolaire, ce qu'a vérifié Lapicque. Or le saccharose pénétrant très mal dans les cellules végétales et l'Ectocarpus ne possédant pas de réserves hydrolysables, cette élévation ne peut être due qu'à une entrée de sels minéraux venus de l'eau de mer. L'addition de saccharose n'ayant en rien modifié les conditions physico-chimiques présidant aux transports passifs (diffusion), Lapicque conclut que ce supplément d'absorption saline (épictèse) était dû à un processus physiologique faisant appel à l'énergie métabolique.

C'était là la première mise en évidence d'un transport actif réalisé contre un gradient électrochimique.

L'épictèse permet à une cellule d'ajuster sa p.o. interne à la p.o. externe, lorsque celle-ci varie. Dans l'eau pure (p.o. : 0), une cellule d'Ectocarpus a une p.o. de 5,5 bars ; dans une solution de 7,5 bars, elle est de 10,8 bars. Le phénomène se retrouve sur les racines des végétaux supérieurs, qui, dans certaines limites, peuvent élever leur p.o. interne alors que la p.o. du sol s'élève (dessèchement, salure). Les halophytes, qui vivent en terrain salé, ont un très fort pouvoir d'épictèse qui leur permet, en surconcentrant leur suc vacuolaire, de maintenir l'hypertonie nécessaire à leur alimentation hydrique, malgré la forte p.o. externe (plusieurs dizaines de bars).

L'épictèse, comme tout transport actif, est réalisée grâce à des « pompes ioniques » situées sur les membranes. Le mécanisme par lequel elles reçoivent le signal extérieur (modification de la p.o. externe) n'est pas connu.

— René HELLER

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur honoraire de physiologie végétale à l'université de Paris-VII, membre de l'Académie d'agriculture

Classification

Pour citer cet article

René HELLER. ÉPICTÈSE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABSORPTION VÉGÉTALE

    • Écrit par René HELLER, Jean-Pierre RONA
    • 4 440 mots
    • 6 médias
    ...par la paroi (élastique et légèrement distendue) sur le contenu cellulaire et qui tend à s'opposer à la pénétration de l'eau des cellules en turgescence. Une baisse du potentiel osmotique, comme il s'en produit par exemple dans l'épictèse (pénétration métabolique d'ions en supplément par rapport...

Voir aussi