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VILA-MATAS ENRIQUE (1948- )

Enrique Vila-Matas, essayiste et romancier, né le 31 mars 1948 à Barcelone, invite ses lecteurs à partager un univers singulier, d'une très grande richesse culturelle et artistique. Sa renommée est aujourd'hui internationale. Après avoir publié un premier ouvrage Mujer en el espejocontemplando un paisaje (1973, Femme dans le miroir regardant un paysage) connu également sous le titre En un lugarsolitario (titre initial qu'il récupérera par la suite) et inspiré par Une méditation de Juan Benet, il se rend à Paris peu avant la fin du franquisme. Dans París no se acabanunca (2003, Paris ne finit jamais), un ouvrage aux confins de l'autobiographie – mais une autobiographie qui, chez lui, se veut toujours fictionnelle – Enrique Vila-Matas évoque ces deux années passées dans la capitale française, trente ans plus tôt, lorsque Marguerite Duras lui louait une chambre de bonne et lui prodiguait des conseils d'écriture. Le titre du livre fait écho à Paris est une fête d'Ernest Hemingway, à qui Vila-Matas souhaite rendre hommage. C'est au cours de cette période qu'il se consacre à la rédaction de La asesinailustrada (1977), qui traite avec ironie du rôle « mortifère » de l'écriture : le livre s'ouvre sur la mort du personnage de l'écrivain Vidal Escabia qui s'est suicidé dans son hôtel après avoir reçu le manuscrit intitulé « La lecture assassine ». Par ce roman déroutant, l'auteur crée un espace de jeu avec le destinataire, faisant de la lecture un acte périlleux.

Le défi de l'écriture

Si Al sur de los párpados (1979, Au sud des paupières) peut se lire comme une œuvre en construction,Impostura(1984, Imposture) – qui se déroule à Barcelone et met en scène un personnage amnésique – et surtout Historia abreviada de la literaturaportátil (1985, Abrégé d'histoire de la littérature portative) vont marquer un tournant dans la carrière de Vila-Matas qui, dès lors, s'impose dans le panorama de la littérature espagnole des années 1980. Il cultive également le genre du récit bref : en 1982, il publie une série de contes au titre provocateur Nuncavoy al cine (Je ne vais jamais au cinéma).

Toujours émaillée de subtiles références littéraires, hantée par des auteurs tels que Laurence Sterne, Robert Walser, Kafka, Musil ou Pessoa, cette écriture postmoderne, qui se nourrit du méta-récit et de l'intertextualité, n'a de cesse de lutter avec humour contre la crise de la littérature qu'elle tente de réinventer et de redéfinir.

Enrique Vila-Matas est un auteur prolifique : en 1988, il publie Una casa para siempre(Une maison pour toujours), en 1991, les récits brefs Suicidiosejemplares(Suicides exemplaires) et en 1993, Hijos sin hijos (Enfants sans enfants), un ensemble de textes placés sous le signe symbolique du nombre 41 et inspirés par Kafka, mort à 41 ans. L'auteur s'inscrit dans un esprit proche de celui des surréalistes et exploite, là encore, le jeu de la supercherie littéraire. Le recueil révèle la « stérilité » des relations humaines et l'échec des rapports entre père et fils, véritable leitmotiv dans l'ensemble de son œuvre. L'atmosphère est tendue, l'humour, grinçant. Enrique Vila-Matas nous invite à réfléchir sur les interdits de la société, les obsessions et les pulsions de mort qui habitent ses personnages. Nombre de ses textes oscillent entre l'essai, la nouvelle et la chronique littéraire comme ceux qui figurent dans des recueils tels que El viajeromás lento (1992, Le Voyageur le plus lent), Para acabar con los númerosredondos (1997, Pour en finir avec les chiffres ronds), Desde la ciudadnerviosa (2000, Mastroianni-sur-Mer) et Chet Baker piensa en su arte (2011, Chet Baker pense à son art). La porosité des genres que révèlent ses écrits s'illustre pleinement dans l'œuvre hybride [...]

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Écrit par

  • : maître de conférences à la faculté des lettres, Sorbonne université

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Pour citer cet article

Corinne CRISTINI. VILA-MATAS ENRIQUE (1948- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

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