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AUBAIN

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Terme qui, dans l'ancien droit français, désigne l'étranger. Dans le morcellement politique du premier âge féodal, l'aubain était non seulement l'étranger au royaume, mais même à la seigneurie : ceux qui venaient du dehors s'établir dans une seigneurie devaient dans l'an et jour s'avouer l'homme du seigneur sur la terre duquel ils s'établissaient, sous peine de s'exposer à être saisis corps et biens ; quant aux aubains venant de l'étranger, ils étaient parfois exposés à être traités par les seigneurs comme des serfs. Peu à peu, la royauté prit les aubains sous sa protection. L'aubain fut alors essentiellement l'étranger au royaume et il ne put reconnaître d'autre seigneur que le roi ; le mouvement ne se fit pas sans de vives résistances de la part des seigneurs hauts justiciers. Une ordonnance de Charles VI de 1386 réserve au roi la succession des aubains dans toute la Champagne et, progressivement, l'aubaine devint droit royal. Telle est la doctrine fortement affirmée par les théoriciens du pouvoir royal à la fin du xvie et au début du xviie siècle. L'aubain, dans ce dernier état de notre ancien droit, est soumis à certaines obligations et se voit frappé de certaines incapacités : il doit payer un droit de chevage, parfois un droit de formariage. Ces droits furent progressivement remplacés par des taxes perçues à diverses occasions par la royauté ; la première fut imposée aux marchands et banquiers étrangers par Henri III en 1587. En outre, si l'aubain ne pouvait exercer des fonctions publiques, il jouissait de la plupart des droits de famille, pouvait librement passer des contrats, acquérir des immeubles et faire des donations ; s'il était demandeur d'un procès, il devait fournir caution garantissant le paiement éventuel des condamnations. L'incapacité la plus lourde résistait donc dans l'impossibilité de recevoir à cause de mort ou de disposer par testament : seul le roi pouvait relever l'étranger de cette incapacité par des lettres de naturalité. Au xviiie siècle, des traités internationaux avec clause de réciprocité firent disparaître le droit d'aubaine au profit de ressortissants de nombreux États ; la Constituante abolit le droit d'aubaine le 6 août 1790, mais le Code civil, sans réintroduire le nom d'aubain, rétablit l'incapacité de disposer et de recevoir à titre gratuit à l'encontre des étrangers (Code civil, art. 726 et 912).

— Jean GAUDEMET

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris, directeur d'études à l'École pratique des hautes études

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Pour citer cet article

Jean GAUDEMET. AUBAIN [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009