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BISṬĀMĪ ABŪ YAZĪD ṬAYFŪR IBN ‘ĪSĀ IBN SURŪSHĀN AL- (mort en 857 ou 874)

Mystique musulman qui vit à Bisṭām (Khurāsān) et y meurt. Son enseignement est oral ; on recueille ses maximes, transmises par son neveu et disciple ; on les commente et on en tire même une véritable légende dorée.

Al-Bisṭāmī (connu aussi sous le nom de Abū Yazīd) a le sens aigu de la grandeur de Dieu. Il voit la réalité humaine comme un obstacle qu'il faut détruire par le fanā' (« annihilation ») afin de parvenir jusqu'à Dieu. La Loi, les promesses du paradis qu'elle apporte ne donnent pas Dieu lui-même ; il faut aller au-delà et déjouer les « ruses » que sont les descriptions des joies célestes mais qui laissent l'homme, comme c'est le cas du Prophète, à deux portées d'arc, ou un peu moins, du Seigneur en majesté (Coran, LIII, 9). C'est, en effet, par ces promesses que Dieu protège son propre mystère.

Mais, quand il s'est dépouillé de son moi « par un entraînement ascétique implacable et forcené » (L. Massignon), al-Bisṭāmī fait l'expérience transfigurante de l'unique présence de Dieu en lui-même. De là viennent les locutions théopathiques (shaṭaḥāt) qu'on lui a sévèrement reprochées (al-Ḥallādj, qui admet ces locutions et qui dit : « Je suis la Vérité créatrice », pense qu'il s'est trop pressé et qu'il parle ainsi avant d'avoir totalement anéanti son moi). Al-Bisṭāmī s'écrie, par exemple : « Las à moi ! Que ma gloire est grande ! »

Il est vraiment un passionné de Dieu, de l'unité, de l'exclusivité de Dieu, de son unicité, de son éternité, de son ipséité. Cette passion s'exprime bien dans le dialogue qu'il échangea avec Yahyā b. Mu‘adh à propos de la coupe mystique : d'une goutte de vin Yahyā est désaltéré. Mais al-Bisṭāmī, enivré, réclame encore à boire : « J'ai bu l'amour coupe après coupe. Le vin n'a pas manqué et je ne suis pas désaltéré. »

— Roger ARNALDEZ

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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Pour citer cet article

Roger ARNALDEZ. BISṬĀMĪ ABŪ YAZĪD ṬAYFŪR IBN ‘ĪSĀ IBN SURŪSHĀN AL- (mort en 857 ou 874) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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