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L'OFFRANDE LYRIQUE, Rabindranath Tagore Fiche de lecture

Rabindranath Tagore - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Rabindranath Tagore

Parue en 1913, L'Offrande lyrique (Gītānjali) du poète indien Rabindranath Tagore (1861-1941), Prix Nobel de littérature la même année, est essentiellement ressentie par les Européens, dans le contexte de la Première Guerre mondiale, comme une invitation à soutenir les valeurs essentielles de l'existence humaine. Pour les lecteurs indiens, cet ouvrage représente le dépassement de la foi brāhmanique familiale vers la quête d'un dieu personnel, celui que Tagore a appelé « le Seigneur de la Vie » : sa perception paradoxale – d'une présence bienveillante immanente et de l'impossibilité de la connaître, de l'appréhender – s'aiguise au fur et à mesure que lui sont dévoilées à travers une série d'expériences tantôt douces, tantôt aigres, les règles de sa participation à un jeu cosmique.

Le recueil original de L'Offrande lyrique parut en 1910 ; il comprenait 157 poèmes tirés de recueils divers. Tagore le traduisit lui-même en anglais : l'édition parut en 1913 avec une Préface du poète irlandais W. B. Yeats. Or L'Offrande lyrique de 1913 diffère du recueil de 1910 : on n'y retrouve que 51 poèmes de la version bengalie, les 35 autres pièces provenant d'autres recueils (Offrandes, 1901 ; La Cange, 1906).

Un recueil anthologique

Avec Offrandes, 1901, Tagore entame une nouvelle phase de son travail poétique : dans ce recueil figurent cent poèmes (dont 78 sonnets), fruits de ses méditations quotidiennes, offerts à Celui qui réside « en tant que centre de toutes mes activités, mes résolutions, mes peines et mes plaisirs, qui est le point de rencontre de tous les atomes et du vaste univers... » Puis, de 1902 à 1907, survient un enchaînement de deuils, dont celui de sa jeune épouse Mrinālini (1902) et de sa fille Rénukā (1903). Persuadé que Celui qui l'a frappé de façon aussi cruelle ne l'a pas pour autant abandonné, Tagore rappelle à ses amis que Celui qui l'a dépouillé est également Celui qui l'a toujours comblé.

Ses engagements patriotiques entraînent Tagore au cœur de l'agitation politique qui s'oppose, en 1905, au projet de diviser le Bengale en deux provinces : l'une, à majorité hindoue ; l'autre, musulmane, afin de maîtriser la montée du nationalisme. Dans La Cange (1906), interrogeant les mille et une diversités qui divisent les Indiens, Tagore va remonter dans l'histoire pour retrouver la spiritualité qui sert de point de convergence à ce peuple. Il va multiplier les poèmes et les chants fervents en louange à la Mère Inde, émanation de la Mère cosmique.

Au paroxysme de cette phase poétique, L'Offrande lyrique érige entre le Moi et le Soi une passerelle d'amour. Depuis son enfance, nourri de la poésie des textes sacrés des Upanishads et du poète persan Hafiz, Tagore s'est laissé emporter par les poètes de la tradition vishnuite : derrière la légende de Rādhā et Krishna, il identifie une aspiration mystique, une soif de se confier et s'unir à un principe divin que les Upanishads décrivent comme le Vrai, le Bien et le Beau.

Autodidacte, Tagore a également trouvé dans l'Ancien Testament et chez les saints chrétiens médiévaux une ascèse similaire, bien qu'il soit peu probable qu'il ait connu saint Jean de la Croix : « Dans une salutation suprême, mon Dieu, que tous mes sens se tendent et touchent ce monde à tes pieds./ Pareil au nuage de juillet traînant bas sa charge d'averses, que mon esprit s'incline devant ta porte dans une suprême salutation. » Ses séjours à Silāïdā où il habite dans une péniche sur la Padmā, le mettent en contact avec la communauté des Bāuls : leur quête du Spontané (sahaj) révèle à la sensibilité de Tagore des rappels de la tradition vishnuite, de celle des Sūfis, des dits du Buddha et les chants Caryā en bengali ancien. Certaines[...]

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Écrit par

  • : docteur d'État (histoire), chargé de recherche au département d'ethnomusicologie, Lacito, C.N.R.S., Paris

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Pour citer cet article

Prithwindra MUKHERJEE. L'OFFRANDE LYRIQUE, Rabindranath Tagore - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Rabindranath Tagore - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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