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WAEHNER KARIN (1926-1999)

La danseuse et chorégraphe Karin Waehner n'appartient pas à la génération des pionniers de la danse moderne européenne, mais à celle de ses disciples. Elle revendiquait fièrement cette filiation, l'héritage de Mary Wigman en l'occurrence, alors qu'elle avait choisi la France d'abord pour danser, puis plus tard, pour enseigner.

Née le 12 mars 1926 à Gleiwitz, en haute Silésie, aux confins de l'Allemagne, elle apprend la danse, grâce à sa mère, dans une école de Dresde où l'on s'inspire de la méthode d'Émile Jaques-Dalcroze. Elle rencontre ensuite celle qui sera son maître incontesté : Mary Wigman. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Wigman professe à Leipzig ; Karin Waehner apprendra auprès d'elle pendant quatre années (1946-1950) dans les conditions difficiles de l'époque, mais avec un enthousiasme et un émerveillement qu'elle ne perdra jamais. « La concentration sur le travail était favorisée par la misère autour de nous », confia-t-elle un jour à une autre chorégraphe de sa génération, Jacqueline Robinson.

Dès la fin de cette période, elle choisit de quitter la République démocratique allemande pour l'Argentine où réside son frère. Professeur assistante dans une école de Buenos Aires, elle fait la rencontre de Marcel Marceau qui lui ouvre un nouvel horizon : celui de la pantomime. Karin Waehner décide alors de se fixer à Paris (1952). Elle travaille auprès d'Étienne Decroux, autre mime célèbre. Pourtant l'élève de Wigman choisira définitivement la danse.

Au début des années 1950, la danse en France a un visage essentiellement classique. Ni les Américains ni même les Allemands n'y ont encore fait souche. Avec quelques autres vaillants modernes, Karin Waehner s'attache à convaincre, à éveiller des sensibilités nouvelles. Elle participe régulièrement aux spectacles de l'association Danse et culture, dirigée par un passionné, Jean Dorcy, et au Théâtre d'essai de la danse, laboratoire chorégraphique animé par Dinah Maggie, critique au journal Combat.

En 1958, Karin Waehner acquiert la nationalité française et fonde sa propre compagnie, les Ballets contemporains Karin Waehner. La chorégraphe part bientôt pour New York ; elle travaille notamment avec José Limon dont elle apprécie l'humanisme, la générosité. Dès 1960, elle se voit confier à la Schola Cantorum un poste d'enseignante qu'elle occupera jusqu'à la fin de sa vie. Là, elle forme des danseurs tels que Jean Pomarès, Angelin Preljocaj, Pierre Doussaint. Sa notoriété indiscutée pousse les pouvoirs publics à lui confier en 1982 un poste de professeur au Conservatoire national de La Rochelle. Pour la première fois, un établissement public élargit son champ d'enseignement à la danse contemporaine.

Pédagogue émérite, Karin Waehner signe également une œuvre importante. Auprès de Louis Horst, aux États-Unis, elle a l'idée de Discours primitif (1959), une pièce à masques, sur les rythmes de tambours caribéens. En 1963, sa sensibilité s'exprime magistralement dans un très pur solo, L'Oiseau qui n'existe pas où le graphisme des lignes s'allie à l'énergie du mouvement. On peut également citer Les Marches (1980), Sehnsucht (1981), Changement de quai à Poitiers (1983) et Dernière Page déchirée (1985). Aux Ballets modernes de Paris, compagnie fondée par Françoise et Dominique Dupuy, elle a laissé La Terre promise (1966), une pièce écrite sur des negro spirituals.

Ses élèves se souviennent de cette petite phrase, égrenée de cours en cours comme une profession de foi : « Donner, c'est mieux que recevoir. »

— Jean-Claude DIÉNIS

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Jean-Claude DIÉNIS. WAEHNER KARIN (1926-1999) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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