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VERDAGUER JACINT (1845-1902)

Fils de paysans pauvres de la région de Vich, dans la province de Barcelone, le petit Jacint entre à l'âge de onze ans au séminaire. Tout en faisant ses études, il aide aux travaux des champs dans une ferme pour gagner quelque argent. Cela le maintient en contact avec la nature et avec le milieu rural ; il saura se souvenir plus tard de cette langue populaire qu'il entend, et qui est tellement plus riche et moins abâtardie que celle de Barcelone.

Au séminaire, il reçoit une solide formation classique, à laquelle vient s'ajouter l'influence du mouvement romantique qui règne encore sur une partie des lettres catalanes au moment où il présente ses premiers poèmes aux jeux Floraux en 1865. Deux de ses compositions : Els Minyons d'En Veciana (Les Garçons de Veciana) et À la mort d'En Rafael de Casanova reçoivent des accessits, ce qui l'encourage à poursuivre son labeur poétique. Il a alors vingt ans ; tous les poèmes de cette époque sont d'inspiration profane. À partir de ce moment et pendant les premières années de son sacerdoce, son inspiration est mystique. Il déclare s'être inspiré de Raymond Lulle, de saint Jean de la Croix et surtout du Cantique des cantiques lorsqu'il publie, en 1877, son premier grand recueil : Idil. lis i cants místics.

Ordonné prêtre en 1870, il est nommé vicaire dans un petit village, Vinyoles d'Oris, où il demeure trois ans. En 1868, il présente aux jeux Floraux de Barcelone un poème, Espanya naixent, qui ne reçoit pas de prix. C'est la première esquisse de son chef-d'œuvre L'Atlàntida. À ces jeux Floraux, il rencontre Mistral qui le salue d'un affectueux : « Tu Marcellus eris », qui va droit au cœur du jeune poète. En 1873 et en 1874, il obtient deux prix avec, respectivement : Plor de la tòrtora (Pleur de la tourterelle) et San Francesc s'hi moria (Saint François y mourait). Il commence déjà à être connu et quand, pour des raisons de santé, il abandonne son vicariat, il est nommé aumônier sur un bateau de la compagnie Transatlàntica, qui appartient à la famille du marquis de Comillas, famille qui le protège pendant de nombreuses années. Il voyage pendant près de deux ans sur la ligne régulière Cadix-La Havane, et c'est pendant cette période qu'il écrit L'Atlàntida, qui obtient, en 1877, le prix extraordinaire du jury des jeux Floraux. Cette œuvre apporte la gloire à Verdaguer et le consacre le plus grand poète épique de son temps. Qu'il nous suffise de dire que L'Atlàntida fut rapidement traduit en castillan, en français, en portugais, en provençal, en italien, en anglais, en allemand, en tchèque, en latin, et même en espéranto : l'Europe entière y reconnaissait un des grands monuments littéraires du xixe siècle.

L'Atlàntida est une œuvre ambitieuse, où se mêlent des éléments de la mythologie grecque, de la Bible, des légendes médiévales, de l'histoire d'Espagne, et pour laquelle l'auteur lit non seulement Platon, Sénèque, Pline, Déodore, mais aussi des géologues, des botanistes, des naturalistes des xviiie et xixe siècles. Et, de surcroît, il veut donner à son œuvre une idéologie chrétienne : la faute et le châtiment divin. Alcide, instrument de la vengeance divine, qui précipite sous les eaux le continent maudit, Christophe Colomb qui dépassera un jour le nec plus ultra fixé par le héros mythique pour donner à la chrétienté un nouveau monde, tels sont quelques-uns des personnages du poème. Mais c'est la Nature, et sa frayeur panique devant les éléments déchaînés, qui est la vraie protagoniste de ce poème cosmique, dans lequel la langue catalane retrouve toute sa musicalité et sa force après des siècles de décadence.

En 1875, il quitte la compagnie Transatlàntica pour entrer comme chapelain et aumônier chez le propriétaire de celle-ci, le marquis de Comillas[...]

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Pour citer cet article

Mathilde BENSOUSSAN. VERDAGUER JACINT (1845-1902) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CATALOGNE

    • Écrit par Mathilde BENSOUSSAN, Christian CAMPS, John COROMINAS, Marcel DURLIAT, Robert FERRAS, Jean MOLAS, Jean-Paul VOLLE
    • 22 274 mots
    • 8 médias
    ...introduit quelques formes populaires de provenance majorquine, et Josep-Lluís Pons i Gallarza a ravivé le souvenir de certains classiques latins et italiens. Jacint Verdaguer i Santaló produit des poèmes d'un mysticisme frémissant ou d'un ascétisme excessif, des Mémoires ou des livres de voyages écrits dans...

Voir aussi