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LE BRAS GABRIEL (1891-1970)

Sociologue et historien du droit, Gabriel Le Bras joua un rôle exceptionnellement fécond pendant presque cinquante années de recherche et d'enseignement dans diverses institutions (faculté de droit de Strasbourg ; faculté de droit de Paris, dont il fut doyen ; École pratique des hautes études ; Institut d'études politiques). Le Bras sut réveiller et renouveler l'histoire du droit romain dans la période médiévale en l'associant et en la confrontant à une discipline connexe, le droit canonique, dans la longue série de ses travaux qui va de l'inventaire de sources manuscrites à une analyse du fonctionnement et de l'évolution des mécanismes complexes de la société religieuse au Moyen Âge. Les historiens de l'Église, conscients des progrès apportés par les synthèses des Prolégomènes à l'histoire du droit et des institutions de l'Église en Occident (1955) et des Institutions ecclésiastiques de la chrétienté médiévale (1959 et 1964), voient en Le Bras un maître dont l'influence ne fera que s'accroître dans toute l'historiographie postérieure.

Bien qu'il n'ait pas voulu être plus « qu'un des initiateurs de la sociographie de la pratique du catholicisme en France », il est reconnu comme l'instigateur d'enquêtes, alors tout à fait neuves, tendant à situer la « place que tient la religion catholique dans les occupations, les démarches, les pensées de nos contemporains [...]. La passion de connaître la vie des hommes nous invite à pénétrer dans les églises de village pour y mesurer un besoin et une force. » Le Bras n'entend pas limiter l'application de cette méthode à la France et au catholicisme mais veut parvenir, par un affinement de celle-ci, à la mise en place d'une typologie, à « une connaissance totale des sociétés religieuses dans le temps et dans l'espace ». Reste encore aux historiens de l'avenir à marquer, entre autres, le rôle tenu par Gabriel Le Bras comme conseiller technique du ministère des Affaires étrangères pour les affaires religieuses, charge remplie par lui durant de nombreuses années avec autant de sens diplomatique que de respect des intérêts spirituels.

L'unité de cette œuvre à plusieurs versants, de cette activité intense et communicative, se fonde sur les ressources d'une personnalité très douée. Né à Paimpol, fils d'un capitaine au long cours, Le Bras, comme Ernest Renan ou Mgr Duchesne, se plaisait à reconnaître dans son caractère les traits de la sensibilité celtique. Causeur très brillant, doué pour la vie sociale et pour les arts, il transposait la plus grande partie de cette vitalité créatrice dans un enseignement « étincelant de science et d'esprit » et dans ses écrits, dont la liste seule témoigne de sa fécondité (évidente dans la bibliographie des Études d'histoire du droit canonique qui lui furent offertes en 1965). Le « discours synthétique » qu'il s'amusa à prononcer à la remise des Mélanges en son honneur, destiné à écarter les éloges posthumes, offre sous une apparente fantaisie un tableau très précis de son évolution intellectuelle et trace « un plan de travail sans limitation de durée », consacré plus spécialement à la direction d'équipes de chercheurs et insistant sur la nécessité de connaître la réalité humaine, tant au niveau des groupes que des personnalités. Gabriel Le Bras explicite ainsi les caractères dominants et les directions principales de son œuvre : histoire de l'Église en Occident jusqu'à la Réforme, histoire du droit romain et du droit canonique au Moyen Âge, histoire générale du Moyen Âge, sociologie et sociographie religieuses.

— Bruno NEVEU

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Bruno NEVEU. LE BRAS GABRIEL (1891-1970) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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