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ANTAL FREDERICK (1887-1954)

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Fils de la bourgeoisie aisée de Budapest, Frederick Antal est à la fois le premier en date et le plus important historien d'art marxiste, et on peut le considérer comme le fondateur d'une histoire de l'art matérialiste libérée de tout esprit spéculatif. Cet homme, qui a participé activement, en 1919, à l'instauration de la République des soviets de Hongrie et qui a dû quitter successivement la Hongrie de Horthy et l'Allemagne nazie, a vécu à Londres jusqu'à sa mort et n'a publié de son vivant qu'un seul ouvrage, La Peinture florentine et son arrière-plan social (Florentine Painting and Its Social Background, 1948), première partie d'une trilogie consacrée à la peinture florentine, du Quattrocento au maniérisme.

Pour comprendre l'importance de la contribution d'Antal et la rupture qu'elle opère dans l'histoire de l'art, il suffit de comparer ses travaux à ceux de Max Dvořák, chez qui Antal a d'ailleurs soutenu sa thèse restée inédite : Classicisme, romantisme et réalisme dans la peinture française de 1750 à l'avènement de Géricault (Klassizismus, Romantik und Realismus in der französischen Malerei von der Mitte des 18. Jahrhunderts bis zum Auftreten Gericaults). Comprendre l'histoire de l'art comme partie de l'histoire générale de l'esprit, comme le fait Dvořák, est sans aucun doute la position la plus avancée qu'une bourgeoisie libérale ait été capable de soutenir sans trahir ses positions de classe. Antal, lui, constate que la mise en rapport de l'art et de l'esprit n'explique pas la coexistence, en un même lieu et en un même temps, de styles différents. Sa contribution peut être considérée soit comme un progrès dû à une analyse plus « approfondie » de l'esprit dont il aurait démontré, suivant les classiques du marxisme, le caractère de classe, soit comme une rupture qualitative puisqu'il remplace le rapport art-esprit de Dvořák par la chaîne « styles artistiques-idéologies des classes-classes sociales ». Antal n'a jamais écrit de textes explicites sur sa propre méthode qu'il désigne comme « méthode d'interprétation sociologique ». L'insuffisance de ses « Remarques sur la méthode en histoire de l'art » (« Remarks on the Method of Art History », in Burlington Magazine, 1949) par rapport à sa contribution réelle découle d'un souci tactique de convaincre les critiques, choqués par son Étude sur la peinture florentine, que sa méthode était déjà appliquée effectivement par des historiens d'art au-dessus de tout soupçon. L'introduction de Florentine Painting est plus instructive du point de vue théorique. Antal utilise en général, dans ses articles publiés, la « langue d'Ésope » afin que son activité scientifique puisse être tolérée. Ainsi il emploie souvent comme synonymes du concept d'idéologie les termes « philosophies du jour », « point de vue » ou « point de vue sur la vie ». Par contre, dans des textes inédits comme Les Musées en Union soviétique (Die Museen in der Sowjetunion), Pourquoi avons-nous aujourd'hui besoin de musées ? (Was sollen heute Kunstmuseen ?), Les Survivances du sentiment religieux médiéval dans l'art italien de la Contre-Réforme (Das Fortleben der mittelalterlichen Religiosität in der italienischen Kunst der Gegenreformationszeit) et Introduction à la peinture au temps de la Réforme (Einführung zur Malerei der Reformationszeit), il conçoit littéralement l'histoire de l'art comme une application du matérialisme historique et l'art comme un phénomène spécifique, lié tant aux rapports sociaux de production qu'aux idéologies des classes sociales. Il utilise même la notion d'idéologie artistique comme synonyme de style. Dans son œuvre monumentale sur la[...]

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Nicos HADJINICOLAOU. ANTAL FREDERICK (1887-1954) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009