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FRANCE (Arts et culture) Les langues régionales

Quel statut juridique ?

Outre les textes cités plus haut, relatifs à l'enseignement, plusieurs textes juridiques contiennent des dispositions concernant les langues régionales en général, ou telle ou telle langue en particulier (loi 84-52 sur l'enseignement supérieur, cahiers des charges de Radio-France, France 3 et R.F.O., décrets concernant l'aide de l'État au secteur cinématographique, lois portant statut de la Corse, de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie...). Selon l'article 21 de la loi 94-665, relative à l'emploi de la langue française, dite loi Toubon, « les dispositions de la présente loi s'appliquent sans préjudice de la législation et de la réglementation relative aux langues régionales de France et ne s'opposent pas à leur usage ». Mais il n'existe aucun texte accordant un véritable statut aux langues régionales. En revanche, depuis 1992, l'article 2 de la Constitution dispose que « la langue de la République est le français ». Malgré les garanties données au moment où elle a été votée, cette disposition a permis le durcissement, dans un sens répressif, de la jurisprudence relative aux langues régionales. En 1996, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelle une disposition instituant le tahitien langue co-officielle du territoire de Polynésie française, ainsi que le caractère obligatoire de l'enseignement de cette langue.

La perspective de la signature par la France de la Charte européenne pour les langues régionales ou minoritaires a donné lieu à une polémique, parfois violente, entre partisans et adversaires de la promotion de ces langues. Le gouvernement a signé la Charte le 7 mai 1999, mais le Conseil constitutionnel, consulté par le président de la République en vue de sa ratification par le Parlement, a déclaré la Charte contraire à la Constitution.

En 2002, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé un arrêté et une circulaire du ministre de l'Éducation nationale relatifs à la mise en place d'un enseignement bilingue par « immersion » en langues régionales dans l'enseignement public, empêchant ainsi l'intégration au service public de l'Éducation nationale des écoles Diwan (écoles bretonnes associatives pratiquant la méthode de l'immersion).

L'évolution du droit constitutionnel et de la jurisprudence s'est caractérisée, depuis la fin des années 1980, par une fermeture croissante à toute éventualité de prise en compte des langues régionales. Ces langues n'ont jamais bénéficié d'un statut légal en France, mais jusqu'aux années 1980, il en était de même pour le français. Depuis cette époque, les textes et la jurisprudence ont enfermé les langues régionales dans un cadre de plus en plus précaire. C'est pourquoi les défenseurs de ces langues revendiquent pour celles-ci un statut constitutionnel.

C'est de moins en moins la présence des langues régionales qui pose un problème à la société (en tout cas en métropole), mais bien leur absence, génératrice de frustration et de malaise identitaire. De nombreux citoyens aspirent à une certaine réappropriation de ces langues. Il paraît nécessaire de donner aux langues régionales ou minoritaires les moyens de leur survie, ainsi qu'un espace social nécessaire à leur développement. Faute de quoi on risque de voir s'exacerber des revendications identitaires.

— Jean SIBILLE

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Écrit par

  • : chargé de mission pour les langues régionales, délégation générale à la langue française, ministère de la Culture

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Jean SIBILLE. FRANCE (Arts et culture) - Les langues régionales [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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