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EXTRÊME GAUCHE

Tout travail sur un mouvement ou un courant politique rencontre rapidement une limite : celle liée à la difficulté de circonscrire un phénomène, d'en donner une description à la fois complète et réaliste. Quand il s'agit de l'extrême gauche, d'autres difficultés interviennent dans le travail d'analyse : comment rendre compte des évolutions que cette « famille » a connues au fil des décennies, alors que les luttes sociales et politiques se sont déplacées, que le contexte international s'est lui-même modifié ? De plus, comment isoler l'extrême d'un paysage politique en recomposition régulière, la difficulté étant plus grande encore lorsqu'on entreprend une comparaison au niveau européen ?

Par conséquent, l'étude de l'extrême gauche appelle nécessairement un premier travail de délimitation de l'objet mais aussi d'identification plus large de ce qu'il est coutume d'appeler, depuis quelques années en France, « la gauche de la gauche ». Très composite, cette dernière vient nourrir une extrême gauche le plus souvent explorée sous sa forme partisane (L.O., L.C.R. et P.T. en France). Ces trois partis « trotskistes » occupent une place importante, du fait de leur poids militant mais aussi de leur présence dans le jeu électoral.

Toutefois, il est également possible de concevoir l'extrême gauche comme une famille politique aux origines et expressions très diverses, puisant dans des répertoires d'action, des histoires mais aussi des formes organisationnelles différentes. En ce sens, la complexité réside tant dans la définition des contours de cette famille politique que dans l'identification d'un terreau commun.

C'est pourquoi réduire l'analyse de l'extrême gauche à ces seuls partis politiques peut sembler réducteur. Par contre, étudier la place de l'extrême gauche au sein de la « gauche de la gauche » permet non seulement d'en saisir les particularités tant idéologiques qu'organisationnelles, mais aussi d'en identifier les strates sédimentaires qui la constituent. En ce sens, les élections peuvent apparaître comme un indicateur parmi d'autres du poids de l'extrême gauche en France et en Europe.

L'extrême gauche française, une famille composite

Une définition complexe

Analyser l'extrême gauche contemporaine invite à s'interroger plus généralement sur le type de regard qu'on pose sur la vie politique en France. Cette dernière doit-elle être circonscrite aux seules consultations démocratiques ou s'établit-elle dans un espace politique plus large ? Dans la première hypothèse, les partis politiques qui participent de manière régulière au débat politique par l'intermédiaire des élections sont seuls soumis à l'analyse. L'observateur évalue une situation électorale spécifique et procède à une observation du phénomène « extrême gauche » au sein de marchés électoraux définis par des règles et des temporalités spécifiques. Or cette position trouve rapidement trois limites. En premier lieu, elle réduit de manière importante l'observation d'un courant politique qui n'a pas toujours considéré les élections comme des indicateurs pertinents de son action ou de son poids réel dans le débat politique. En deuxième lieu, elle considère l'extrême gauche comme réductible à quelques partis politiques : mais l'extrême gauche peut tout autant être analysée comme la partie extrême de chaque formation de gauche, voire comme une mouvance plus diffuse présente tant dans des partis politiques que dans les univers syndicaux, associatifs du fait de l'« entrisme », des itinéraires militants voire des collaborations ponctuelles ou pérennes. Enfin, elle réduit l'extrême gauche à la tradition marxiste-léniniste, dans laquelle le parti d'avant-garde reste la forme la plus adaptée au combat politique.[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en science politique (U.N.S., laboratoire E.R.M.E.S.)

Classification

Pour citer cet article

Christine PINA. EXTRÊME GAUCHE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Bakounine - crédits : Nadar/ Getty Images

Bakounine

Kropotkine, vers 1910 - crédits : Edward Gooch Collection/ Getty Images

Kropotkine, vers 1910

Barricade durant la Commune de Paris - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Barricade durant la Commune de Paris

Autres références

  • FRANCE - L'année politique 1998

    • Écrit par Nicolas TENZER
    • 3 158 mots
    ...Ceux-ci se sentent négligés et ils s'estiment enrôlés dans l'application d'un programme politique où leur base éprouve des difficultés à se reconnaître. De surcroît, le développement de l'extrême gauche et de mouvements civils de contestation – sans-papiers, chômeurs –, ajouté à des scores électoraux stagnants,...
  • INTELLECTUEL

    • Écrit par Jean Marie GOULEMOT
    • 9 442 mots
    • 2 médias
    Désormais proche de l'extrême gauche, Sartre retrouva, durant les années 1970, avec de nouveaux compagnons, son activité pétitionnaire et ses tâches militantes : vente de La Cause du peuple, fondation en 1973 du quotidien Libération. Le modèle de Che Guevara inspira de jeunes intellectuels...
  • ITALIE - La vie politique depuis 1945

    • Écrit par Geneviève BIBES, Universalis, Marc LAZAR
    • 31 410 mots
    • 12 médias
    ...secrets, par exemple) et les classes intermédiaires marginalisées par la crise. Si le signal du terrorisme est donné par l'extrême droite, une extrême gauche radicale a également trouvé dans la grande mobilisation sociale et dans la crise économique qui l'a suivie un climat favorable. Le rejet...
  • OCI (Organisation communiste internationaliste)

    • Écrit par Paul CLAUDEL
    • 1 038 mots

    Organisation trotskiste (dont les militants sont parfois nommés, du nom de leur leader, Pierre Boussel, alias Lambert, « lambertistes »), l'O.C.I. a pour origine une scission au sein de la IVe Internationale (1952). L'O.C.I. va inspirer l'action des Comités d'alliance ouvrière (C.A.O.),...

Voir aussi