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CIPAYES (RÉVOLTE DES)

Révolte des cipayes - crédits : Felice Beato/ Getty Images

Révolte des cipayes

Les cipayes, de l'anglais sepoy, venu du persan sipāhi (le français spahi n'a pas d'autre origine), étaient les mercenaires autochtones de l'armée britannique de l'Inde au xixe siècle.

Les expressions quelque peu péjoratives de « révolte des cipayes » et de « mutinerie indienne », utilisées respectivement en français et en anglais, désignent un événement capital qui a marqué l'Inde au xixe siècle et que l'on nomme sur place la « grande rébellion », la « première révolution indienne » ou la « première guerre d'indépendance indienne ».

Le point de départ en fut effectivement une mutinerie de soldats indiens de la garnison de Meeruth (10 mai 1857), que leurs officiers britanniques voulaient contraindre à déchirer de leurs dents de nouvelles cartouches enduites de graisse de bœuf (animal sacré des hindous) ou de porc (animal impur des musulmans comme des hindous). La révolte gagne rapidement les autres garnisons, dont celle de Delhi, et se transforme en un soulèvement général de toute la population de la plaine du Gange contre l'occupant étranger. Les Britanniques sont assiégés dans leurs quartiers.

Hindous et musulmans, citadins et paysans appauvris, artisans ruinés par l'industrie anglaise, fonctionnaires démis, princes dépossédés, tous ont des griefs qui les unissent contre la domination coloniale.

Plusieurs personnalités de premier plan se révèlent dans l'action : outre le Grand Moghol Bahādūr chāh, souverain théorique de l'Inde, qui, malgré son grand âge, suit le mouvement, ce sont principalement Nana-Sahib, dernier héritier des souverains mahrāttes, Tantia Topi, son général, puis la rāni (reine) de Jhānsi, qui meurt à la tête de ses troupes et est célébrée comme une Jeanne d'Arc de l'Inde moderne.

Répression de la révolte des cipayes, F. Beato - crédits : Felice Beato/ Universal Images Group/ Getty Images

Répression de la révolte des cipayes, F. Beato

Mais le mouvement ne peut gagner tout le pays et reste limité à l'Inde du Nord et du Centre. La supériorité technique et logistique des Britanniques l'emporte, appuyée sur d'autres mercenaires : Gurkhas du Népal, Afghans et Sikhs du Punjab, par exemple. Mais l'armée britannique met plus d'un an à rétablir l'ordre colonial ; officiellement, cet ordre revient le 8 juillet 1858 ; en fait, le conflit persiste jusqu'en 1859, cela au prix d'atrocités nombreuses, les atrocités des Britanniques surpassant celles des révoltés, car elles sont commises systématiquement, en nombre, et à froid : sac de Delhi et massacre de centaines d'Indiens attachés à la bouche des canons.

Cette première révolution indienne oblige la puissance britannique à infléchir considérablement sa politique en Inde. Le gouvernement supprime la Compagnie des Indes, le pays est administré directement, et le souverain anglais ceint la couronne impériale de l'Inde. Sur place, au lieu de tendre à évincer les princes locaux, l'administration s'appuie sur eux et renforce leurs privilèges ; par crainte des anciens cadres administratifs musulmans de l'Empire moghol, les Britanniques favorisent pour un temps leur remplacement par des hindous.

Quant aux Indiens, ces événements leur auront donné confiance en eux-mêmes, en montrant à quel prix l'occupant pouvait être mis en difficulté : la condition est de réaliser l'unité nationale et de maîtriser le progrès technologique.

— Roland BRETON

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, maître assistant à l'université d'Aix-Marseille

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Pour citer cet article

Roland BRETON. CIPAYES (RÉVOLTE DES) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Révolte des cipayes - crédits : Felice Beato/ Getty Images

Révolte des cipayes

Répression de la révolte des cipayes, F. Beato - crédits : Felice Beato/ Universal Images Group/ Getty Images

Répression de la révolte des cipayes, F. Beato

Autres références

  • AOUDH, OUDH ou AVADH

    • Écrit par Roland BRETON
    • 254 mots

    Région de la plaine du Gange dont le nom vient de celui de la ville antique d'Ayodhya, capitale du royaume de Kosala, dont Rāmā, conformément à l'épopée du Rāmāyana, fut le souverain. Après avoir suivi les vicissitudes historiques complexes de cette plaine et vu d'autres capitales naître dans la...

  • INDE (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par Universalis, Christophe JAFFRELOT, Jacques POUCHEPADASS
    • 22 936 mots
    • 25 médias
    ...économiques du régime colonial, ou heurtées dans leurs convictions. La mutinerie qui éclate en mai 1857 dans la caserne de Meerut s'élargit soudain en soulèvement populaire à travers le bassin du Gange moyen et une partie de l'Inde centrale, sous la direction de princes déchus et de landlords spoliés....
  • INDE BRITANNIQUE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Olivier COMPAGNON
    • 577 mots

    Juin 1757 L'officier anglais Robert Clive écrase à Plassey une armée indigène et, en prenant le contrôle du Bengale, permet le renforcement de la présence anglaise en Inde.

    1784 L'India Act renforce le pouvoir de la Couronne britannique sur l'East India Company.

    1848-1856 ...

  • NĀNĀ SĀHIB DUNDHU PANTH dit (1825-? 1862)

    • Écrit par Roland BRETON
    • 150 mots

    L'un des chefs de la première guerre d'indépendance indienne, dite révolte des Cipayes. Nānā Sāhib est le fils adoptif du peshwa, c'est-à-dire du chef de la Confédération marathe, qui fut détrôné par les Britanniques à l'issue de la dernière guerre marathe en 1818. À la mort du peshwa...

Voir aussi