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ROMAN CIESLEWICZ, LA FABRIQUE DES IMAGES (exposition)

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L’image en question

La salle des « collages répétitifs et collages centrés » montre ses premiers travaux d’atelier en France, libres de toute commande – une liberté qu’il revendique dans sa vie professionnelle, assumant le statut de graphiste auteur, indépendant, de plus en plus éloigné des contraintes publicitaires qu’il dénonce. Cette position est affirmée avec la création du visuel Zoom contre la pollution de l’œil, pour le magazine éponyme, inaugurant la pratique des « cyclopes » dont l’œil unique regarde un monde saturé d’images et de sens. Dans la salle suivante, « la trame » met en évidence une technique chère à Cieslewicz, qui correspond à une tendance, jamais démentie depuis lors, à la simplification, au rejet de tout superflu, de même qu’à l’usage d’un matériel iconographique improbable : photocopies, fax, images pixellisées. Un exergue est consacré cette fois à Mona Lisa, icône manipulée et modifiée au gré de ses préoccupations et variations de styles et de techniques. « Photomontages » fait la part belle à deux grandes démarches : celle de Changement de climat qui propose une série de photomontages très colorés fondés sur la citation d’œuvres de grands maîtres mariées à des images d’actualité, et les publications Kamikaze, « revue d’information panique » (numéro 1 édité par Christian Bourgois en 1976, numéros 2 et 3 par Agnès B. en 1991 et 1993), où le montage est abandonné au profit de la pure confrontation par double page de photographies de presse, ce que Cieslewicz qualifie de « photographisme ».

La dernière salle, « hygiène de la vision », correspond à la dernière décennie de son existence, pendant laquelle Roman Cieslewicz intensifie ses collaborations avec la presse écrite. Il collabore au quotidien Libération, à partir de 1989, à Révolution, périodique du Parti communiste français ; il conçoit la formule de la revue scientifique VST en 1988 ; L’Autre Journal, dirigé par Michel Butel, fait appel à lui en tant que conseiller artistique, en 1992. De la même manière que dans son recueil personnel Pas de nouvelles/Bonnes nouvelles, série de photomontages en noir et blanc, paru en 1987, il donne son point de vue sur l’époque, délivrant des commentaires débarrassés de toute anecdote contre l’apartheid, la montée de l’extrême droite en France ou les dangers du nucléaire. Après que le Centre Georges-Pompidou lui a consacré une rétrospective personnelle en 1993, une première concernant un graphiste contemporain, le quotidien Le Monde lui confie la conception graphique de l’album anniversaire de ses cinquante ans, en 1994. En couverture, sur un fond blanc, apparaît un globe terrestre noir parsemé de quelques taches de couleurs, formant un signe puissant qui parle d’un monde menacé. Cette réalisation sera sa dernière commande importante. Roman Cieslewicz meurt le 21 janvier 1996 à Paris. Sa postérité est immense et offre une leçon toujours d’actualité aux jeunes générations de graphistes et d’artistes.

Le catalogue, conçu par le graphiste Jocelyn Cottencin, comprend deux volumes disposés dans un coffret. Le premier constitue un recueil de textes sous la forme d’un abécédaire, et présente les archives et travaux préparatoires inédits de l’artiste. Le second est consacré à ses réalisations achevées et rassemble plus de 700 reproductions.

— Michel WLASSIKOFF

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Écrit par

  • : historien du graphisme et de la typographie, diplômé en histoire de l'École des hautes études en sciences sociales, Paris

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Pour citer cet article

Michel WLASSIKOFF. ROMAN CIESLEWICZ, LA FABRIQUE DES IMAGES (exposition) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 30/11/2018