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TSIRANANA PHILIBERT (1912-1978)

Né dans le village de Ambarakorano, dans le nord-ouest de Madagascar, Philibert Tsiranana appartient à l'ethnie Tsimihety, l'une des plus importantes tribus de l'île. Originaire d'une modeste famille d'agriculteurs, catholique, il aimera rappeler tout au long de sa carrière politique qu'il est « fils de bouvier » et, à ce titre, issu du peuple.

Après avoir fréquenté l'école primaire et régionale, il entre en 1930 à la célèbre école coloniale Le Myre-de-Villers, qui forme les fonctionnaires malgaches. À vingt ans il est instituteur ; il enseigne pendant douze ans. Admis en 1946 à l'École normale de Montpellier, il en revient quatre ans plus tard avec le grade d'instituteur du cadre métropolitain et est affecté à Tananarive comme professeur d'enseignement technique.

Il se lance dans la vie politique, sous l'égide du Parti socialiste français (S.F.I.O.), à partir de 1952 ; il est élu conseiller provincial de Majunga, puis conseiller à l'Assemblée représentative de l'île. En 1956, il est élu député à l'Assemblée nationale française, et il apparaît dès lors comme le véritable leader des « côtiers ». Il fonde à Majunga, en décembre 1956, le Parti social-démocrate (P.S.D.), dont il est le secrétaire général, et qui va prendre un essor inattendu dans la foulée du Padesm (Parti des déshérités de Madagascar).

Après le vote de la loi-cadre Tsiranana est porté en 1957 à la vice-présidence puis à la présidence du Conseil de gouvernement. Il fait campagne pour le « oui » au référendum de septembre 1958 et assume la direction de la République malgache autonome créée le 14 octobre 1958. Élu président de la Ire République en mai 1959 à la quasi-unanimité, il conduira rapidement en personne les négociations pour obtenir, en juin 1960, l'indépendance politique de son pays. C'est lui qui, au Comité consultatif constitutionnel de 1958, avait suggéré le mot « Communauté » pour qualifier le nouvel ensemble politique créé par la Constitution française de 1958. En juillet 1960, il fait rentrer à Tananarive les parlementaires malgaches qui avaient été « bannis » à la suite des événements de 1947.

La Ire République malgache a été dominée par le P.S.D. et par la forte personnalité de Tsiranana, réélu président de la République en 1965 et en janvier 1972. Partisan de liens privilégiés avec la France et l'Occident, il s'oppose à tout ce qui est marxiste, mais préserve toutefois le pluralisme des forces politiques. Au sein des organisations internationales telles que l'O.N.U., l'O.U.A. (Organisation de l'unité africaine), ou l'O.C.A.M. (Organisation commune africaine et malgache), il prône la modération, le dialogue avec l'Afrique du Sud, et tente de faire de Madagascar le prototype du pays stable et ouvert. Sur le plan interne, il entend incarner l'unité nationale.

Mais les zizanies internes au sein du gouvernement et du P.S.D. conduisent Tsiranana, affaibli par la maladie en 1970 et souvent mal conseillé, à prendre des décisions surprenantes, telle l'arrestation de son dauphin André Resampa, sous prétexte de complot dont il reconnaîtra ultérieurement l'inexistence. À partir de 1971, Tsiranana, qui supporte de moins en moins les critiques et n'hésite pas à se réclamer de la volonté divine, perd manifestement du crédit dans l'opinion au moment où la crise étudiante et politique exigerait une approche toute différente.

Incapable d'opérer cette transmutation il est contraint, à la suite d'une journée d'émeute, le 13 mai 1972, de donner les pleins pouvoirs au général Ramanantsoa, tout en espérant reprendre la direction politique après le retour au calme. En fait, il se trouve destitué par le référendum du 8 octobre 1972 qui introduit un régime provisoire de cinq ans. Accusé de compromission dans l'assassinat,[...]

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Écrit par

  • : professeur agrégé à l'université d'Aix-Marseille-III, ancien doyen de la faculté de droit et des sciences économiques de l'université de Madagascar

Classification

Pour citer cet article

Charles CADOUX. TSIRANANA PHILIBERT (1912-1978) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MADAGASCAR

    • Écrit par Marie Pierre BALLARIN, Chantal BLANC-PAMARD, Hubert DESCHAMPS, Bakoly DOMENICHINI-RAMIARAMANANA, Universalis, Paul LE BOURDIEC, David RASAMUEL
    • 35 132 mots
    • 11 médias
    ...14 mai 1959, mais l'indépendance n'est proclamée que le 26 juin 1960, après la négociation d'accords bilatéraux de coopération technique et culturelle. Élu premier président de la République de Madagascar le 1er mai 1959, Philibert Tsiranana adopte une politique de continuité avec la France et développe...
  • RAMANANTSOA GABRIEL (1906-1979)

    • Écrit par Charles CADOUX
    • 907 mots

    Né à Tananarive dans une famille de la haute bourgeoisie merina, Gabriel Ramanantsoa s'oriente vers la carrière des armes à l'issue de ses études secondaires. Sorti de Saint-Cyr en 1931 (promotion Mangin), il terminera son service dans l'armée française avec le grade de colonel (1958) pour se mettre...