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NOTRE AGENT À LA HAVANE, Graham Greene Fiche de lecture

L'œuvre littéraire du romancier anglais Graham Greene (1904-1991) est abondante et diverse. Notre Agent à La Havane (1958) se situe au milieu de sa carrière. Greene a déjà laissé derrière lui les romans « catholiques » de ses débuts, qui ont marqué leur époque (surtout La Puissance et la gloire, 1940), mais ne touchent pas de la même façon le lecteur d'aujourd'hui. D'un autre côté, Notre Agent à La Havane n'appartient ni à la veine franchement comique de l'avant-dernière période (Voyages avec ma tante, 1969), ni à l'apparente austérité teintée d'invention baroque de la toute dernière phase (Le Docteur Fischer de Genève, 1980).

Un espion imaginaire

L'œuvre romanesque de Greene se caractérise entre autres par la variété géographique et politique des terrains qu'elle couvre. Plusieurs pays d'Afrique, le Mexique, le Vietnam, Haïti figurent parmi ses décors ; de tous Greene parle avec compétence. Notre Agent à La Havane se passe, comme l'indique son titre, à Cuba ; l'action se situe avant l'arrivée au pouvoir de Fidel Castro, sous la dictature de Batista. Celui-ci n'est pas nommé dans le roman, mais représenté par son chef de la police, appelé Ventura dans la réalité, Segura dans la fiction. Le personnage principal – qui ne mérite pas d'être qualifié de héros – est l'Anglais Wormold, qui vend des aspirateurs à La Havane. Par mollesse, par incapacité de prendre une décision, fût-ce celle d'un refus, il se laisse enrôler comme agent des services secrets britanniques. Wormold, abandonné par sa femme, élève seul leur fille Milly, jolie adolescente qui a des goûts dispendieux. Wormold n'aura aucune activité d'espionnage, mais amassera pour sa fille un pécule en envoyant des rapports et des notes de frais concernant ses missions et celles des collaborateurs qu'il prétend avoir recrutés ; missions et agents sont purement imaginaires ; seul son compte en banque est réel.

Un séjour que fait Wormold à Kingston est évoqué dans une page caractéristique de l'univers de Greene : « Il y avait de nombreuses années que Wormold n'était pas allé à la Jamaïque, et il fut épouvanté par la saleté et la chaleur qui y régnaient. Comment expliquer l'aspect sordide des possessions britanniques ? [...] Les Anglais se contentent de laisser pousser les agglomérations. La rue la plus pauvre de La Havane a une certaine dignité, comparée aux masures où vivent les habitants de Kingston : huttes fabriquées avec de vieux bidons à essence, et dont le toit est fait de ferraille empruntée au cimetière de voitures abandonnées. » Les choses se compliquent quand Londres dépêche auprès de Wormold une secrétaire et un opérateur radio ; la falsification mise en œuvre finit par éclater. Après les péripéties parfois violentes mais presque toujours drolatiques de la fin du livre, « notre agent », démasqué, rentre en Angleterre avec sa fille et reçoit des services secrets, qui ne veulent pas ébruiter la façon dont il les a bernés, un emploi et une décoration.

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Écrit par

  • : professeur émérite de l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

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Pour citer cet article

Sylvère MONOD. NOTRE AGENT À LA HAVANE, Graham Greene - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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