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NARCO-ANALYSE

Méthode de diagnostic et de traitement associant la prise d'un somnifère et l'analyse psychologique. L'idée de profiter de la sédation pour calmer l'angoisse et lever les défenses conscientes et inconscientes est ancienne, mais elle ne prit force qu'après l'utilisation médicale de l'hypnose ; on demanda aux somnifères de remplacer l'hypnose dans l'induction d'une dissolution de la conscience (en termes jacksoniens). C'est ainsi que Claude et ses collaborateurs (1924) explorent la démence précoce par l'éthérisation ; la même année, Laignel-Lavastine fait d'un barbiturique intraveineux le « révélateur du subconscient ». E. Lindemann (1932) observe que, sous un tel barbiturique, le sujet normal devient euphorique, loquace, et révèle des secrets.

La narco-analyse proprement dite fut inventée par J. S. Horsley en 1936. Elle consiste en l'injection lente d'une solution à 5 p. 100 d'amytal, de pentothal ou d'évipan sodiques, injection qu'on interrompt au moment de la somnolence et qu'on peut reprendre au cours d'une même séance ; les séances sont hebdomadaires ; elles sont exécutées par un médecin spécialisé dans la technique et connaissant déjà bien le sujet. Dans la conscience crépusculaire ainsi créée, des souvenirs réapparaissent, des conflits latents reviennent en surface, des émotions et des automatismes psychomoteurs se libèrent. Dans les névroses traumatiques, on assiste à un véritable onirisme de la réminiscence, à une ecmnésie, que la parole du médecin peut réintégrer à la conscience.

On a ainsi soigné un grand nombre de névroses de guerre entre 1939 et 1945, en intégrant au « narco-diagnostic » une « narco-synthèse ». Par la suite, les auteurs français (Delay, Sutter, Targowla, Heuyer) ont repris la méthode, l'ont validée et en ont élargi les indications, soit dans une perspective organo-dynamique, soit dans le cadre des psychothérapies d'inspiration psychanalytique. En dehors des névroses traumatiques, elle est utilisée dans les névroses d'angoisse, dans quelques cas de névroses obsessionnelles, dans l'exploration des états limites, pour lesquels elle permet de préciser diagnostic et pronostic, dans les maladies psychosomatiques ou les troubles sexuels. Mais elle est rarement suffisante et n'est le plus souvent qu'un élément, parmi d'autres, d'une psychothérapie. On constate, d'ailleurs, que pour celle-ci elle est, dans bien des cas, d'un apport inutile sinon d'un usage dangereux par la manière dont le thérapeute en fait le moyen de forcer les réticences et les résistances du sujet.

Le terme de narco-analyse a de nombreux synonymes : subnarcose barbiturique, narcose liminaire, narcothérapie, état hypnagogique provoqué, etc. On a même appelé cette technique « sérum de vérité » quand on a cru pouvoir en faire un détecteur de mensonges ou une méthode d'obtention de l'aveu judiciaire. En fait, les révélations obtenues par ce moyen ne serviraient pas sans tromperie de tels desseins policiers ; elles contiennent plus de fantaisies que de réalités et l'on a dû abandonner l'espoir de tirer quoi que ce soit de sérieux d'une telle méthode, qui est d'ailleurs moralement fort contestable.

— Georges TORRIS

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Georges TORRIS. NARCO-ANALYSE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009