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EMINESCU MIHAIL (1850-1889)

Né l'année où meurt Balzac, le Roumain Mihail Eminescu publie ses premiers poèmes, d'un romantisme tantôt languide, tantôt brutalement pessimiste, à une époque où le romantisme occidental est sur sa fin. Ce décalage est à noter d'une manière générale dans l'histoire de la littérature roumaine, mais pour Eminescu il ne s'agit pas vraiment d'influence à retardement. Aussi bien a-t-il subi, au dire de la plupart des critiques de son pays, toutes sortes d'influences, depuis l'Antiquité classique jusqu'à la philosophie de Schopenhauer, depuis les Edda scandinaves jusqu'au bouddhisme. Ce romantique a écrit Lacul (Le Lac), comme Lamartine, mais on a voulu découvrir des traces de Paul Bourget dans son inspiration...

Une existence pathétique

Mihail Eminescu est né le 15 janvier 1850 à Ipoteşti, village de haute Moldavie. Sa famille était d'origine paysanne, mais son père avait réussi à devenir intendant de domaine et même à acquérir un titre de petite noblesse. Le jeune Mihail fit ses études au lycée de Cernǎuţi et, dès l'âge de quatorze ans, il manifesta un curieux désir d'indépendance et d'évasion : il suivit en Transylvanie des acteurs ambulants. On trouve sa trace à Bucarest en 1868. Puis son père l'envoie comme étudiant à Vienne où il se mêle à la jeunesse libérale et écrit ses premiers poèmes. Après un bref séjour à Iaşi, il repart pour l'étranger, à Berlin cette fois, grâce à l'appui de la Société littéraire Junimea et de son président Titu Maiorescu.

Il rentre définitivement au pays, en 1875, sans avoir acquis de titre universitaire dans la discipline qu'il avait choisie, la philosophie. Ses amis conservateurs, dont le parti est au pouvoir, le font nommer bibliothécaire à Iaşi puis inspecteur des écoles. Il s'adonne un moment au journalisme, mais la défaite électorale des conservateurs l'amène à quitter Iaşi pour Bucarest où il arrive au mois d'octobre 1877. Il entre alors au journal de ses protecteurs, Timpul (Le Temps). Mal payé, mal logé, se nourrissant mal, il mènera une vie de bohème, marquée à partir de 1883 par l'alternance de crises dépressives et de périodes de lucidité. Interné dans un hospice en 1889, il meurt le 15 juin à la suite d'une blessure à la tête, un de ses compagnons d'infortune lui ayant lancé une pierre. En réalité, c'est une crise cardiaque qui l'a emporté. Il n'avait pas quarante ans.

Un grand amour a traversé la vie d'Eminescu, celui qu'il a voué dès 1872, quand il était étudiant à Vienne, à Veronica Micle, épouse très jeune d'un vieux professeur de Iaşi. Amour romantique s'il en fut, et qui, à la mort du mari, en 1879, connut des épisodes d'ardeur, de jalousie puis de désenchantement, jusqu'à la rupture. Les amants se réconcilièrent sur le tard, le poète étant déjà gravement malade.

Veronica Micle, qui écrivait elle-même des vers non dénués de talent, est morte quelques mois après Eminescu.

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur honoraire à l'Institut national des langues et civilisations orientales et à l'université de Paris-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Alain GUILLERMOU. EMINESCU MIHAIL (1850-1889) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ROUMANIE

    • Écrit par Mihai BERZA, Catherine DURANDIN, Universalis, Alain GUILLERMOU, Gustav INEICHEN, Edith LHOMEL, Philippe LOUBIÈRE, Robert PHILIPPOT, Valentin VIVIER
    • 34 994 mots
    • 17 médias
    ...plusieurs décennies, la Junimea et les Convorbiriliterare ont régenté les lettres roumaines. Leur grand titre de gloire est assurément d'avoir patronné à ses débuts le poète Mihail Eminescu et permis au conteur Ion Creangă de publier ses œuvres, récits populaires et souvenirs d'enfance.

Voir aussi