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MENÉNDEZ Y PELAYO MARCELINO (1856-1912)

L'œuvre immense de Marcelino Menéndez y Pelayo a renouvelé l'image du passé espagnol. Elle reste jusqu'à nos jours l'inventaire le plus fourni et le plus imposant de toutes les richesses culturelles de l'Espagne. Après Balmes, après Donoso Cortés, mais sur un terrain plus accessible, celui de l'érudition et de l'histoire des idées, Menéndez y Pelayo donne à la pensée conservatrice espagnole ses lettres de noblesse. L'érudition libérale ne trouvera jamais une réponse adéquate à cette évocation à la fois simpliste et puissante.

L'érudition espagnole du xixe siècle n'était pas négligeable avant lui, mais Menéndez y Pelayo lui assigne un rôle plus ambitieux, l'élevant à la dignité d'histoire des idées. À la fin de sa vie, achevée symboliquement à la tête de la Bibliothèque nationale de Madrid, le plus grand des érudits espagnols était non seulement la figure intellectuelle la plus représentative de son temps, en Espagne, mais sa véritable conscience culturelle.

La « science espagnole »

Fils d'un professeur d'enseignement secondaire, Menéndez y Pelayo a pu faire des études classiques très poussées, d'abord à Santander, sa ville natale, puis à Barcelone et à Madrid. L'enseignement supérieur de l'époque laisse beaucoup à désirer, et ce n'est qu'avec la génération de Menéndez y Pelayo que l'Espagne comptera ses premiers maîtres d'envergure européenne. Toutefois, l'université catalane connaît, au moment où Pelayo la fréquente, une sorte de renaissance : il y trouve les maîtres de sa vie : M.  Milá y Fontanals, érudit, philologue, spécialiste d'études littéraires médiévales, et F. Llorens, auteur d'Essais critiques où se trouvent, en germe, certaines idées du futur historien de la littérature. L'œuvre de Llorens reflétait l'influence de la philosophie écossaise du common sense. Cette influence se fera sentir aussi chez Pelayo et sera ensuite renforcée par sa rencontre avec Gumersindo Laverde, un des esprits les plus attachants de son temps. Le « réalisme » écossais apparaît aux yeux du jeune Menéndez y Pelayo comme la meilleure réponse philosophique au « krausisme », doctrine d'inspiration idéaliste, d'origine allemande, dont une partie de l'élite espagnole libérale avait fait sa pâture. Ce « réalisme » philosophique, conjugué avec le strict respect de l'orthodoxie catholique, sous-tend toute l'attitude idéologique et culturelle de Menéndez y Pelayo. Très tôt il manifestera son extraordinaire culture et ses dons de polémiste ; sa précocité intellectuelle est devenue légendaire dans le monde hispanique, et non sans raison.

En 1877, à vingt et un ans, il publie La Ciencia española, premier jalon d'une œuvre monumentale consacrée à la découverte et à la définition nouvelle de l'image, devenue très floue, du rôle et du sens de la culture espagnole. Expression outrée du nationalisme culturel, La Science espagnole doit être tenue pour la réaction véhémente et juvénile du ressentiment profond dont souffre alors la conscience historique de l'Espagne, tiraillée entre une apologie rhétorique de ses anciennes gloires et la tentation de l'autodénigrement. Le titre « science espagnole » doit être pris dans un sens large. Il s'agit de montrer à ses compatriotes l'étendue et la force de la présence culturelle du pays au long de son histoire. Le jeune polémiste, déjà remarquable érudit, centre son plaidoyer sur le xvie siècle, au moment où la pensée espagnole est, sans conteste, l'une des pensées directrices de l'Europe. Paradoxalement, cette apologie de la renaissance catholique du xvie siècle souligne, par contraste, l'effacement, non moins sensible, de la culture espagnole postérieure.

Menéndez y Pelayo décèlera[...]

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Écrit par

  • : licencié de philosophie, lecteur à la faculté des lettres de Nice

Classification

Pour citer cet article

Edouardo DE FARIA. MENÉNDEZ Y PELAYO MARCELINO (1856-1912) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ROMANCERO

    • Écrit par Daniel DEVOTO
    • 2 862 mots
    ...textes conservés : il en compte dix-sept, entre 1421 et 1508. Ces pièces ouvrent la période dite du romancero viejo, et ces romances sont, d'après Menéndez y Pelayo, d'abord « ceux dont l'existence au xve siècle appert de façon positive », suivis des écrits identiques imprimés dans la...

Voir aussi