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LÉGION ÉTRANGÈRE

En 1830, voulant éviter qu'à l'avenir le souverain puisse disposer à sa guise d'une force armée indépendante de la nation, les hommes qui avaient porté Louis-Philippe sur le trône firent ajouter à la Charte constitutionnelle la phrase suivante : « Toutefois aucune troupe étrangère ne pourra être admise au service de l'État qu'en vertu d'une loi ». Les régiments suisses et les étrangers servant dans le régiment de Hohenlohe furent donc licenciés. Dans le même temps, la France accueillait des milliers de réfugiés politiques que l'État devait faire vivre. Pour réduire les frais d'entretien, le gouvernement fut autorisé, par la loi du 9 mars 1831, à lever une légion étrangère. En 1835, elle était cédée à l'Espagne, et peu après recréée pour participer à la conquête de l'Algérie. Depuis 1836, les missions ont changé ; les effectifs ont varié de 3 000 (1862 et 1872-1880) à 35 000 hommes (1940 et 1952) et 40 000 (1960) pour retomber à 7 500 hommes en 1980 et à 8 200 en 2007 ; mais l'existence de la Légion n'a jamais été sérieusement menacée.

Autour de Français espérant y vivre des expériences exceptionnelles ou désirant racheter un passé douteux, la légion a regroupé des hommes en quête d'aventures et des victimes de toutes les crises politiques ou économiques qui ont ébranlé le monde depuis 1831. Par leur nombre, certaines d'entre elles ont caractérisé le recrutement de leur temps : Allemands, Italiens et Polonais (1831-1835), Alsaciens-Lorrains (1872-1890), Allemands et Russes blancs (1919-1930), Espagnols républicains (1938-1940), réfugiés d'Europe centrale (1940), Allemands (1945-1954) et Britanniques après la guerre des Malouines (1982).

En règle générale, les engagements sont souscrits à titre étranger, sans que le candidat soit tenu de justifier de son identité. S'il déclare un faux état civil, il sera couvert par l'anonymat : aussi longtemps que sa présence à la Légion ne sera dévoilée, ni de son fait ni du fait d'un tiers, il sera protégé contre toute intervention extérieure relative à son passé. Après un certain temps de service, il peut, s'il le désire, reprendre sa propre identité ; il perd alors le bénéfice de l'anonymat. Les Français et les étrangers naturalisés français peuvent, avec l'autorisation du ministre de la Défense, s'engager ou se rengager à titre français ; ils sont alors régis par le statut général des militaires de leur catégorie. La loi du 9 mars 1831 et les lois postérieures sur l'organisation de l'armée ont limité l'emploi (et non le stationnement) de la Légion sur le territoire national aux opérations de guerre étrangère. Dans ce cas, le légionnaire, sujet d'un État ennemi, est dispensé, s'il le désire, de combattre. Sauf exceptions, la Légion a donc vocation de servir outre-mer.

Après quelques années difficiles, la Légion a su s'imposer tant au combat que dans la construction des équipements (routes, voies ferrées, adductions d'eau, bâtiments). Envoyée en Crimée (1854) en dépit des réticences de certains généraux, elle s'est montrée également capable de prendre part efficacement aux guerres européennes. Par la suite, renforcée d'étrangers engagés volontaires pour la durée de la guerre, elle a brillamment participé à la guerre de 1870 et aux deux guerres mondiales. C'est ainsi que le régiment le plus décoré de l'infanterie française est un régiment de la Légion. De tous les combats qu'elle a menés, elle place au premier rang Camerone (Mexique, 1863), dont elle célèbre toujours l'anniversaire avec éclat, Tuyen-Quang (Tonkin, 1885), El-Moungar (Sud algérien, 1903), le percement de la ligne Hindenburg (1918), Rachaya (Syrie, 1925) et Phu-Tong-Hoa (Tonkin, 1948). Ces affaires révèlent deux caractères[...]

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Écrit par

  • : commandant, professeur à l'École supérieure de guerre

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Pour citer cet article

Henry DUTAILLY. LÉGION ÉTRANGÈRE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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