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LE TRAÎTRE (M. Bellocchio)

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Question de méthode

Le film est très loin d’une variation supplémentaire sur la mafia. À partir des thèmes souvent génialement évoqués – on pense au Mouchard de Ford (1935) ou aux Affranchisde Scorsese (1990) –, Bellocchio construit des séquences au classicisme parfait, sans jamais idéaliser son personnage. Buscetta n’agit ni par intérêt ni par peur. Le réalisateur montre bien la complexité de ses motivations, toutes d’ordre moral, même s’il s’agit de la morale d’un bandit. C’est pourquoi le récit des rapports entre le juge Falcone et Buscetta, filmé avec rigueur par Bellocchio, constitue un des axes majeurs du film. Méthodique, lucide, Buscetta possède une vision extrêmement cohérente de la structure qu’il a décidé de dénoncer et il est capable d’en rendre compte avec une grande clarté, tout comme le metteur en scène lui-même quand il expose ces événements historiques, l’assassinat du juge Falcone en 1992 à Capaci, ou encore le maxiprocès de Palerme, avec ses combats de coqs opposant les mafieux derrière leur cage de verre et ceux témoignant à charge (475 condamnations en 1987).

Si le champ-contrechamp Falcone-Buscetta et le maxiprocès de Palerme tiennent une place considérable dans le récit, il est riche d’autres séquences, comme celle qui ouvre le film et qui précède la « trahison » de Buscetta, une cérémonie « familiale » à la Coppola, indispensable si on prépare un récit scorsesien de trahison. Bellocchio montre aussi longuement Buscetta dans son provisoire refuge brésilien, sa confrontation très violente avec la police de Rio, et filme son extradition dans des séquences hallucinantes. La complexité du projet exigeait un comédien exceptionnel, Pierfrancesco Favino, qui met en évidence la singularité du personnage, notamment en passant, lui qui est un acteur romain, des intonations siciliennes au portugais brésilien, puis à un italien plus lisse quand il échange avec Falcone ou qu’il témoigne au procès.

— René MARX

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René MARX. LE TRAÎTRE (M. Bellocchio) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 11/12/2019