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CARRERA ANDRADE JORGE (1903-1978)

Fils d'un magistrat à la Cour suprême de Quito (Équateur), Jorge manifesta, dès sa prime adolescence, un goût pour la poésie. Il lisait alors Los Siete Tratados de Juan Montalvo et Les Fêtes galantes de Verlaine, mais la grande révélation lui fut apportée par l'Antología de la poesía francesca moderna, traductions de Canedo et Fortún. En même temps, il passait de longues périodes avec ses parents dans le domaine familial, où il apprenait à sentir l'infinie poésie des êtres et des choses de sa terre.

Étudiant en droit à l'université de Quito, sa générosité foncière le porte à se faire l'apôtre de la rédemption des pauvres et il devient l'un des fondateurs du socialisme équatorien ; mais il doit bientôt partir pour l'Europe où il complète ses études, à Barcelone et à Paris, puis à Londres et à Berlin. Particulièrement estimé d'écrivains en renom (Gabriela Mistral, Francis Jammes...), il est influencé par Apollinaire, Jammes, Jules Renard, Supervielle, les symbolistes, puis par le surréalisme et ce qu'il appelle le « réalisme magique ».

Bientôt célèbre, il revient dans sa patrie où il pense faire une carrière politique. Élu sénateur, il ne siège pas, car sa connaissance du vaste monde le désigne pour la diplomatie. De Santiago à Rio de Janeiro, de Caracas à Managua, de Paris à La Haye, il va montrer aux chancelleries le vrai visage de sa patrie.

Peu à peu, l'écrivain prend une conscience plus profonde de ce qu'il porte en lui : « le fardeau poétique et le fardeau de la mélancolie indigène américaine ». C'est ce qu'il chante dans son recueil Lieu d'origine (1945). Sa terre natale mêlée de ses morts et des ruines de sa maison lui donne le sens profond de la vie : ce sol renferme les ossements du passé mais aussi les semences de l'avenir. La « musique du monde » chante déjà l'unité planétaire et la famille universelle. Au cours des années cinquante, la pensée de Jorge trouve son équilibre ; il extrait de son œuvre antérieure une anthologie personnelle : Edades poéticas (Quito, 1958), précédée d'une longue préface qui nous donne les clés de sa vision poétique. Parmi ses œuvres en prose, il faut surtout citer : Visages et climats (1948) et La Terre toujours verte (1955).

L'œuvre entière de Carrera Andrade est marquée d'un profond lyrisme qui mêle intimement une culture européenne moderne à une indianité très marquée. Elle porte évidemment quelques traces des modes littéraires comme, par exemple, l'emploi de la métaphore à la façon dont en ont usé Lugones et Borges, Herrera y Reissig et Gorostiza. Cependant, la métaphore chez Carrera Andrade ne correspond pas à la recherche d'un effet, elle est l'expression d'une perception vive que l'imagination poétique transforme en vision lyrique.

Bien que sa prose soit une des plus ductiles de la littérature hispano-américaine actuelle, c'est surtout par son œuvre poétique que Jorge Carrera Andrade marquera sa place définitive dans les lettres équatoriennes.

— Jean de MILLERET

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Jean de MILLERET. CARRERA ANDRADE JORGE (1903-1978) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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