Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

QUADROS JÂNIO DA SILVA (1907-1992)

Deux phases marquent la carrière politique de Jânio Quadros : d'abord, la période 1947-1961, qui commença par ses mandats municipaux successifs à São Paulo et se termina par sa fracassante renonciation à ses fonctions de président de la République au mois d'août 1961 ; puis, les années 1985-1992, pendant lesquelles il fut élu, pour la seconde fois, maire de São Paulo. Entre ces deux phases, le Brésil subit, pendant deux décennies, une dictature militaire dont l'instauration fut largement facilitée par la crise politique et institutionnelle engendrée par la brusque interruption de la présidence Quadros en 1961.

En 1947, pour la première fois, il accéda au poste de conseiller municipal de São Paulo. Auprès de l'électorat des faubourgs plus pauvres, Quadros déclencha la campagne du « sou contre le million » (o tostão contra o milhão), se présentant comme le candidat des défavorisés abandonnés par les grands partis. Quelques années plus tard, il obtint l'appui d'un front de petits partis et parvint à se faire élire maire de la ville en 1953.

Doté d'un réel charisme, Quadros apparaissait comme un des leaders du renouveau politique brésilien. Aux élections de 1954, il poursuivit son ascension et remporta le poste de gouverneur de l'État de São Paulo. On considérait alors que Quadros, à la tête du plus puissant État de la fédération, était en bonne position pour succéder à Juscelino Kubitschek à la présidence de la République. Mais, déjà, l'individualisme forcené et le discours démagogique — fondé sur des promesses électorales irréalistes — devenaient les principales caractéristiques du gouverneur de São Paulo. Sachant que sa candidature à la présidence l'obligeait à chercher l'appui d'un grand parti, Jânio Quadros obtint l'investiture de l'Union démocratique nationale (U.D.N.), rassemblement conservateur des classes moyennes. Vainqueur de l'élection de 1960, il fut le premier chef d'État à exercer ses fonctions à Brasília, la nouvelle capitale fédérale. Loin de l'opinion publique et de la presse de Rio de Janeiro, entouré par une administration et un Congrès mal installés à Brasília, peu à l'aise dans ses relations avec l'U.D.N., Quadros pratiqua une forme de gouvernement qui faisait alterner des actes importants en politique extérieure (rétablissement des relations avec l'U.R.S.S.) et des gestes déroutants dans le domaine intérieur (interdiction des combats de coqs, création d'un uniforme « tropical » pour les fonctionnaires publics). Brusquement, après à peine sept mois d'exercice du pouvoir, Quadros renonça à ses fonctions. En réalité, les témoignages rendus publics après sa mort démontrent que, comptant sur le désarroi qui serait créé par sa démission, Quadros espérait revenir à la tête de l'État muni des pleins pouvoirs. La manœuvre putschiste ayant échoué, Quadros partit pour un exil volontaire à Londres, laissant le pays plongé dans une grave crise politique.

Son retour sur la scène politique se produisit en 1984, à la fin de la dictature militaire. S'il fut alors candidat malheureux au gouvernement de l'État de São Paulo, il parvint en 1985 à être élu maire de la ville de São Paulo. Pendant un temps, les conservateurs brésiliens, effrayés par le succès électoral de la gauche, essayèrent de persuader Quadros de se porter candidat au scrutin présidentiel de 1989. Déjà atteint par la maladie, Quadros dut cependant renoncer aux joutes politiques, ouvrant la voie à Fernando Collor de Mello, candidat victorieux des élections de 1989 et dont le profil politique était assez proche du sien.

— Luiz Felipe de ALENCASTRO

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur d'histoire du Brésil, directeur du Centre d'études du Brésil et de l'Atlantique sud à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Autres références

  • BRÉSIL - Le Brésil contemporain

    • Écrit par et
    • 5 683 mots
    • 5 médias
    Élu à la présidence en 1960,Jânio Quadros apparaît comme un démagogue, mettant tour à tour les partis politiques au service d'une ambition forcenée. Signe du maintien de l'influence travailliste, João Goulart est réélu à la vice-présidence. En conflit avec le Congrès, Quadros quitte son poste en...