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KOCHANOWSKI JAN (1530-1585)

Jan Kochanowski appartient à ce que les historiens polonais appellent l'âge d'or, c'est-à-dire la période de brillante civilisation que connurent les règnes des derniers Jagellons (Sigismond le Vieux et Sigismond-Auguste, 1505-1572). Il est le créateur de la poésie polonaise à qui il a donné son instrument, ses sources, ses modèles, ses références, son objet, sa tradition. Il lui a façonné une langue polie, harmonieuse, précise et dense : le langage courant, souvent proche de la prose, mais qui, avec la propriété et le nombre, toujours, est expressif. Il a introduit une vision nouvelle, poétique, du monde, celle où le regard s'arrête sur les choses, en saisit la beauté, en prolonge les résonances. Entre les données de la « polonité » et les éléments de la culture antique filtrés avec un sens judicieux de ce qui était assimilable, Kochanowski a confirmé l'orientation prise, dès les origines, par la civilisation et les lettres polonaises et, en affinant leur support autochtone précieusement préservé, créé la synthèse qui devait s'affirmer comme l'authentique tradition nationale et la direction majeure de ses épanouissements ultérieurs.

Un disciple des classiques

La vie de Kochanowski, né à Sycyna, près de Radom, dans une famille aisée de propriétaires terriens, se déroule en trois périodes également riches d'expériences dont s'est nourrie son activité créatrice : années d'apprentissage et de voyages, avec des études commencées à Cracovie et poursuivies à l'étranger, notamment à Padoue où il acquiert une solide formation humaniste ; carrière auprès de magnats dont la protection le conduit aux fonctions de « secrétaire » à la cour royale ; années de retraite, enfin, dans son bien familial de Czarnolas où, de 1574 jusqu'à une mort prématurée en 1585, il se consacre aux soins de son domaine et à la poésie.

L'œuvre de Kochanowski est écrite concurremment en latin et en polonais. Dans la part latine (un tiers), les élégies composées en Italie sont capitales pour la formation du poète : elles montrent le jeune humaniste à l'école de l'Antiquité, dans l'apprentissage du métier, s'assimilant les tours, les formes et les procédés des grands auteurs, se pénétrant de leurs préceptes, affinant sa vision des choses, s'exerçant à l'expression heureuse et précise, conformément aux modèles.

L'œuvre en polonais, conçue selon la doctrine alors en honneur de l'imitation (depuis la traduction et la paraphrase jusqu'à la création originale), se caractérise par la diversité des sujets et l'heureuse acclimatation en Pologne des thèmes, figures, genres et formes empruntés aux anciens. Il fait siennes leur conception de la poésie – art qui sauve de l'oubli et de la mort tout ce qu'il touche – et celle du poète consacrant sa vie et ses veilles au service des Muses (Muzy), sans, pour autant, demeurer étranger à son temps et à son pays. Il est ainsi poète-citoyen, soucieux du bien public, moraliste enseignant la rectitude des mœurs, patriote jaloux de la sauvegarde et de la grandeur de la République. Tel il apparaît, dès 1564, dans les discours en vers La Concorde (Zgoda) et Le Satyre (Satyr), tableaux vigoureux, lucides, parfois finement ironiques, de la situation politique, religieuse, sociale et morale de la Pologne ; dans L'Étendard (Proporzec), fragment épique à la gloire du monarque recevant l'hommage du duc de Prusse ; même dans Le Renvoi des ambassadeurs grecs (Odprawa poslów greckich, 1578), tragédie avec chœurs où l'épisode du rapt d'Hélène renferme une leçon politique. À la beauté des fables gréco-latines, Kochanowski joint, pour l'enrichissement de la poésie polonaise, la grandeur des accents bibliques restitués en strophes horatiennes dans sa fameuse traduction des Psaumes de David ([...]

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Jean BOURRILLY. KOCHANOWSKI JAN (1530-1585) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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