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FARRELL JAMES THOMAS (1904-1979)

Romancier naturaliste américain, disciple de Dreiser, et comme lui d'origine étrangère et catholique, James T. Farrell décrit un milieu qu'il connaît bien pour en être lui-même issu, celui de la petite bourgeoisie irlando-américaine à Chicago dans les années vingt et trente ; ses meilleurs livres ont un caractère nettement autobiographique.

De son œuvre considérable, il faut d'abord retenir la trilogie de Studs Lonigan, qui comprend Young Lonigan (Young Lonigan, a Boyhood in Chicago Streets, 1932), La Jeunesse de Studs Lonigan (The Young Manhood of Studs Lonigan, 1934) et Le Jugement dernier (Judgment Day, 1935). Farrell y décrit impitoyablement la déchéance et la décomposition morale d'un jeune garçon américain d'origine irlandaise, victime de son milieu et de son époque ; le milieu, cette petite bourgeoisie à peine sortie de la misère, uniquement orientée vers les valeurs matérielles, raciste (en raison surtout de l'incertitude de son statut dans la société américaine) et, sur le plan culturel et spirituel, d'une affligeante pauvreté qu'entretient un clergé rétrograde. L'adolescent ne peut trouver ses modèles que dans la rue, chez les « durs » qui boivent sec, courent les filles et fréquentent les salles de billard. L'époque est celle de la Prohibition : le modèle devient le gangster, et l'existence une suite de bagarres, de « cuites » et de pâles aventures féminines. Survient la crise de 1929, le chômage, la ruine de la famille : Studs, déjà délabré, sombre complètement ; il meurt d'une pneumonie contractée un jour qu'il gisait ivre mort sous la neige.

Le radicalisme politique de Farrell transparaît sous cette lamentable histoire ; cette chronique est en effet celle de sa haine contre les forces de l'obscurantisme (l'Église en particulier) et de sa révolte contre une société qui n'a rien à proposer à ses enfants.

Dans la longue tétralogie de Danny O'Neill (qui comprend A World I Never Made, 1936 ; No Star Is Lost, 1938 ; Father and Son, 1940, et My Days of Anger, 1943), Farrell décrit l'itinéraire inverse : Danny O'Neill, ami de jeunesse de Studs, échappe à son milieu à force de volonté et de travail. Personnage plus proche de Farrell lui-même, il est cependant, comme lui, en quelque sorte atypique. Le produit logique du milieu social reste Studs ; c'est pourquoi l'œuvre la plus forte de Farrell est sans doute sa trilogie ; d'autant qu'en bon naturaliste il n'est jamais aussi convaincant qu'en montrant comment les forces sociales se conjuguent pour déterminer l'écrasement d'un individu.

— Jean-Paul ROSPARS

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître assistant à l'Institut Charles-V, université de Paris-VII-Denis-Diderot

Classification

Pour citer cet article

Jean-Paul ROSPARS. FARRELL JAMES THOMAS (1904-1979) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par Marc CHÉNETIER, Rachel ERTEL, Yves-Charles GRANDJEAT, Jean-Pierre MARTIN, Pierre-Yves PÉTILLON, Bernard POLI, Claudine RAYNAUD, Jacques ROUBAUD
    • 40 118 mots
    • 25 médias
    Toute l'œuvre de James T. Farrell plonge ses racines dans la subculture irlando-américaine de Chicago dont il est issu. Il s'emploie à recréer un milieu aux confins de la petite bourgeoisie et du prolétariat médiocre, vulgaire, bigot, corrompu et corrupteur. Sa trilogie (Young Lonigan, 1932...

Voir aussi