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ÖRKÉNY ISTVÁN (1912-1979)

Le plus étonnant des écrivains hongrois, l'« inventeur » du genre grotesque, fut d'abord ingénieur chimiste. Bien qu'il n'ait jamais exercé cette profession, sa conception du monde fondée sur des sciences naturelles est une des caractéristiques de son œuvre. L'élément grotesque est apparu dès sa première nouvelle, une parabole sur la prise de pouvoir par Hitler représentée comme la révolte des habitants d'un asile d'aliénés. Szép Szó (Belle Parole, 1936-1939, revue qui avait pour rédacteurs en chef Attila József et Pál Ignotus) l'a publiée en 1937, avant qu'elle ne paraisse dans un recueil en 1942. Mais la gloire de l'écrivain ne durera pas. Örkény sera prisonnier dans des camps russes pendant cinq ans, période au cours de laquelle son tempérament, d'épique, deviendra dramatique. Ses premiers reportages et portraits écrits au camp et paraissant en Hongrie portent trace de cette mutation, mais ils laissent aussi présager le réalisme souvent pathétique qui régit ses œuvres jusqu'en 1953 : Lagerek népe, 1947 (Le Peuple des camps), Hazastarsak, 1951 (Un couple), Korankelo emberek, 1951 (Les Lève-tôt). Dans celles-ci, les impératifs du style « réaliste socialiste », l'emploi obligatoire du « romantisme révolutionnaire » empêchent de vivre des personnages par ailleurs bien caractérisés.

À l'époque des purges, on accusera Örkény de « sombrer dans une sexualité pourrie », parce que le héros de Lila Tinta, 1952 (Encre violette), pas assez positif, se laisse séduire par une femme épanouie, mais bête.

En 1953, Örkény commence à parler de l'époque du « culte de la personnalité » en usant du style qui sera le sien désormais : sec, sans ornements, cruel. Tels sont les récits de Ezüstpisztráng, 1956 (Truite argentée). Mis à l'écart pour avoir participé aux événements de 1956, Örkény ne peut publier pendant dix ans. Il met au point la technique de l'écriture grotesque tout en travaillant dans une usine. Jeunes Mariés sur le papier tue-mouche (1967) comporte des situations proches de celles qu'évoque son titre même. « Ce sont des équations mathématiques : du côté de l'écrivain, le minimum d'information, du côté du lecteur, le maximum d'imagination. » Publiés en 1966 et 1967, Macskajáték et Tóték (Chat ! et La Famille Tót) paraissent d'abord sous forme de roman, mais deviennent célèbres dans le monde entier grâce à leur adaptation théâtrale. Tóték reçoit en France le « grand prix de l'humour noir du spectacle 1970 ». L'histoire des Tót est exemplaire : ils se font victimes volontairement en se pliant aux folies d'un assaillant dont finalement ils se débarrassent. Les héroïnes de Chat ! communiquent entre elles par-dessus le rideau de fer. Pour Egyperces novellák, 1969 (Nouvelles d'une minute), Claude Roy proposera le titre de Mini-Mythes. Il caractérisera le recueil en trois mots : « humour, concision, plurivocité ». Par la suite, Örkény continuera, dans son œuvre scénique, de traiter de l'homme qui peut être bon ou mauvais, selon la situation. Kózsakiállitás (Floralies) est une méditation sur la mort.

— Véronique KLAUBER

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Véronique KLAUBER. ÖRKÉNY ISTVÁN (1912-1979) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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