Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

XÉNOPOULOS GRIGORIOS (1867-1951)

Pratiquement inconnu hors des frontières de son pays, Grigorios Xénopoulos est pourtant, par l'ampleur et la diversité de sa production, la figure dominante, la plus populaire aussi, de la littérature grecque de l'entre-deux-guerres. Né à Istanbul, auteur d'une vingtaine de romans, d'autant de recueils de nouvelles, il s'est en effet illustré dans tous les genres, du théâtre au journalisme, avec une aisance et un « professionnalisme » qui ne sont pas sans nuire, parfois, à la qualité de son œuvre. À la différence de ses maîtres avoués (Balzac, Dickens, Zola), Xénopoulos ne vise pas à composer une fresque systématique de la société de son temps. Le décor privilégié de ses romans demeure l'île de Zante, où lui-même a grandi parmi les souvenirs vivaces d'une occupation vénitienne puis anglaise, et surtout le monde de la bourgeoisie athénienne, alors en pleine mutation. De fait, la capitale grecque — avec ses nouveaux riches, ses intrigues, mais aussi ses exclus —, dans laquelle Xénopoulos a vécu sans interruption durant plus d'un demi-siècle apparaît bien comme le personnage essentiel de la plupart de ses récits. Converti de bonne heure au démoticisme, écrivant dans une langue transparente, accessible au plus grand nombre, il est l'un des premiers à avoir appliqué au roman grec les critères de l'école naturaliste, pour qui le narrateur doit divertir et s'effacer devant la réalité sociale qu'il dépeint. Socialiste, Xénopoulos le fut un temps, comme en témoigne son œuvre la plus marquante (une trilogie : Plousioi kai Ptôchoi, « Riches et Pauvres », 1926 ; Timioi kai Atimoi, « Gens de bien et Gens de rien », 1927 ; Tucheroi kai Atuchoi, « Chanceux et malchanceux », 1928), mais, perméable aux courants de la pensée contemporaine, et en particulier aux découvertes de la psychanalyse, il se montra ensuite partisan d'un certain réalisme psychologique (ainsi dans son roman-fleuve Ho Kosmakès, « Kosmakis », relatant les tribulations d'un séducteur). Malgré tout, à travers ses multiples portraits de femmes, son évocation foisonnante de la vie athénienne, l'œuvre romanesque de Xénopoulos offre davantage au lecteur d'aujourd'hui l'incarnation d'une époque révolue que l'expression d'un tempérament littéraire original. Dans le domaine du théâtre, en revanche, où il a introduit un ton nouveau, à la fois réaliste et intimiste, certaines de ses pièces (Stella Violandi) sont devenues des « classiques » du répertoire grec. Il faut enfin citer à son actif ses activités de critique. Fondateur de la revue littéraire Nea Estia et collaborateur de tous les grands journaux de son époque, il fut, entre autres, l'un des premiers à découvrir et à imposer l'œuvre de Cavafy. S'il fut nommé membre de l'Académie d'Athènes en 1931 et vénéré par ses contemporains à l'égal d'un Palamas, on comprend que Xénopoulos, technicien du verbe plutôt qu'artisan, novateur et non révolutionnaire, n'ait jamais franchi le cercle du public pour lequel il écrivait. Mais il est, des écrivains de son temps, celui qui aura tracé le cercle le plus large.

— Gilles ORTLIEB

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Gilles ORTLIEB. XÉNOPOULOS GRIGORIOS (1867-1951) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Voir aussi