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MEREDITH GEORGE (1828-1909)

Féminin-masculin

Pour l'écrivain, grand admirateur de Molière, le comique et la comédie ne sont possibles que là où règne l'égalité des sexes (aussi ne saurait-on le chercher en Espagne ou en Italie) : la femme est regard, pierre de touche, épreuve ; c'est par elle que l'homme est jugé. Mais l'égalité des sexes se heurte à l'obstacle des conventions et de la vanité masculine. Ce qui a fasciné l'écrivain, bien avant Lawrence, ce sont les composantes féminines de l'homme et celles, viriles, de la femme : conception moderne, hardie du couple qui s'accompagne de l'examen de deux problèmes importants entre tous, l'éducation, l'émancipation des femmes. Tantôt misogyne, constatant que la femme est douée de l'« inertie du légume », tantôt féministe et créateur d'une série de portraits féminins dont la richesse rappelle celle de Shakespeare – femmes capables de façonner les hommes ou de causer leur perte –, Meredith se débat dans l'ambivalence causée par les drames de sa vie personnelle. Sa première femme, fille de l'écrivain Peacock, qu'il épousa alors qu'elle était veuve, devait bientôt le quitter pour vivre avec son meilleur ami. Elle finit par se suicider sans avoir obtenu le pardon de Meredith. Ces drames intimes donnent à la peinture que fit l'écrivain des relations entre les sexes une tragique acuité. De même, les rapports admirablement décrits entre père et fils, entre éducateur et enfant, notamment dans Richard Feverel, où un fils est brisé par un système absurde, borné, rigide, effrité par un précepteur cynique, voyeur, égoïste, reflètent les préoccupations essentielles d'un homme qui connut tous les conflits opposant un fils à son père, et un père à son fils. Talent prodigieusement divers selon que Meredith ménage des paroxysmes où le personnage se dévoile brusquement comme au théâtre (technique de L'Égoïste) ; ou qu'il fait planer comme dans Les Aventures de Harry Richmond cette brume dorée, posée sur le réel, d'une adolescence amoureuse de mythes, dans un récit rapide et lisse mené à la façon d'un Stevenson ; ou qu'il se montre lyrique comme dans les cinquante poèmes de L'Amour moderne (1862) inspirés par sa vie privée et la lutte des sexes ; ou, enfin, qu'il se révèle impitoyable, dévidant jusqu'au bout le réseau de la mauvaise foi, dans une analyse qui décapite l'ancien romantisme. Meredith apparaît comme un pionnier, à la recherche de sa propre formule, dont toute la complexité et la hardiesse sont à redécouvrir.

— Diane de MARGERIE

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Diane de MARGERIE. MEREDITH GEORGE (1828-1909) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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