DEVERS GAIL (1966- )
Athlète américaine spécialiste du sprint et des courses de haies, Gail Devers remporta trois médailles d'or aux jeux Olympiques et cinq médailles d'or aux Championnats du monde en plein air dans les années 1990. Pourtant, avant de connaître la gloire, elle endura mille souffrances : victime de la maladie de Graves (maladie auto-immune provoquant une hyperthyroïdie), elle dut se soumettre à des séances de radiothérapie et de chimiothérapie ; sa trajectoire symbolise le courage dont certaines championnes sont dotées. De manière plus anecdotique, elle se faisait remarquer sur les pistes par des ongles immensément longs toujours vernis avec originalité et élégance. Son gabarit de poche (1,58 m, 54 kg) lui permettait de réaliser des départs rapides et elle excellait de ce fait dans les épreuves très courtes : elle remporta trois fois le 60 mètres (1993, 1997, 2004) et une fois le 60 mètres haies (2003) aux Championnats du monde en salle.
Gail Devers est née le 19 novembre 1966 à Seattle dans une famille aimante. Douée pour le sport, elle s'oriente vers les courses de haies, intègre l'université de Californie à Los Angeles (U.C.L.A.) à dix-sept ans et est championne scolaire de Californie du 100 mètres haies en 1984. Elle rejoint ensuite le groupe entraîné par Bob Kersee, où elle côtoie Florence Griffith et Jackie Joyner ; elle progresse, bat le record des États-Unis du 100 mètres haies (12,61 s) et se présente ambitieuse aux Jeux de Séoul en 1988. Or, en Corée du Sud, elle échoue totalement, terrassée par la fatigue en demi-finale. La santé de Gail Devers se détériore (suintements des pieds qui l'empêchent de marcher, violentes migraines, baisse d'acuité visuelle...) : le diagnostic tarde, les médecins songent un moment à l'amputation des pieds. Bonnie Flores, médecin à l'U.C.L.A., trouve enfin l'origine des souffrances de la jeune femme : elle est victime de la maladie de Graves. Radiothérapie et chimiothérapie parviennent à la guérir ; elle rechausse les pointes en 1991 et obtient la médaille d'argent dans le 100 mètres haies des Championnats du monde d'athlétisme de Tōkyō la même année. Ses espoirs olympiques reprennent corps : elle gagne sa sélection pour les Jeux de Barcelone en 1992 non seulement pour le 100 mètres haies, mais aussi pour le 100 mètres. En Catalogne, le 100 mètres féminin donne lieu à une course serrée : les cinq premières se tiennent en 4 centièmes de seconde ; l'examen de la photo-finish indique que Gail Devers est la gagnante (10,82 s). Après ce triomphe inattendu, l'Américaine semble pouvoir s'adjuger sans mal une seconde médaille d'or, cinq jours plus tard, dans son épreuve de prédilection, le 100 mètres haies : elle réalise une course splendide, tient sa victoire... mais heurte l'ultime obstacle et voit la Grecque Paraskevi Patoulidou, une inconnue, franchir en tête la ligne d'arrivée. Elle se remet de sa déception et obtient la médaille d'or dans le relais 4 fois 100 mètres.
Gail Devers multiplie alors les performances, aussi bien sur 100 mètres que sur 100 mètres haies : en 1993, aux Championnats du monde de Stuttgart, elle remporte les deux épreuves et ajoute la médaille d'argent dans le relais 4 fois 100 mètres ; deux ans plus tard, à Göteborg, elle est de nouveau championne du monde du 100 mètres haies.
En 1996, aux jeux Olympiques d'Atlanta, elle se distingue encore. Le 27 juillet, la finale du 100 mètres lui sourit de nouveau : il faut néanmoins un long examen de la photo-finish avant que le jury annonce sa victoire, car la Jamaïquaine Merlene Ottey est créditée de la même performance qu'elle (10,94 s) – Devers sera déclarée championne olympique pour 5 millièmes de seconde (ce qui correspond à 4 cm), et les réclamations de la délégation jamaïquaine ne seront pas entendues. Si le 100 mètres haies constitue encore une déception olympique (elle est quatrième), Gail Devers obtient une nouvelle médaille d'or avec le relais 4 fois 100 mètres américain.
À trente ans, Gail Devers modifie son approche de la compétition. Elle décide d'alléger son entraînement en 1997 (elle obtient néanmoins la médaille d'or dans le relais 4 fois 100 mètres aux Championnats du monde d'Athènes) et de privilégier les courses de haies, car elle fait de la médaille d'or olympique dans cette épreuve le grand défi de la fin de sa carrière. En 1999, à Séville, elle remporte le titre mondial du 100 mètres haies pour la troisième fois, en réalisant son meilleur temps (12,37 s). En juillet 2000, à Sacramento, lors des sélections américaines pour les Jeux de Sydney, elle améliore son record des États-Unis du 100 mètres haies (12,33 s) ; la médaille d'or olympique lui semble promise. Mais le sort s'acharne : à Sydney, elle se blesse en demi-finale et assiste impuissante à la victoire de la Kazakhe Olga Shishigina, dont la performance modeste (12,65 s) peut lui laisser d'immenses regrets.
Malgré la déception et l'âge, Gail Devers ne met pas un terme à sa carrière. En 2001, elle est médaillée d'argent dans le 100 mètres haies aux Championnats du monde d'Edmonton ; en 2003, elle remporte le 60 mètres haies à l'occasion des Championnats du monde en salle de Birmingham. Gail Devers, à près de trente-huit ans, parvient encore à gagner sa sélection pour les jeux Olympiques d'Athènes en 2004, où elle est éliminée en demi-finale du 100 mètres et, blessée, doit déclarer forfait pour le 100 mètres haies. Elle devient mère en 2006, puis tente en 2007 un retour à la compétition peu convaincant.
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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