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SUHARD EMMANUEL, cardinal (1874-1949)

Archevêque de Paris de 1940 à 1949, fondateur de la Mission de France. Né en Mayenne, Emmanuel Suhard fait ses études au petit, puis au grand séminaire de son diocèse (Laval) mais les termine à Rome, où il est ordonné prêtre (1897). Il est nommé au grand séminaire de Laval, où il sera professeur de philosophie, puis de théologie et dont il sera enfin le supérieur. En 1928, trois ans après la canonisation de Thérèse de Lisieux, il est nommé évêque de Bayeux et de Lisieux et rédige sa première lettre pastorale (févr. 1929) sur la sainte carmélite, patronne des missions. Archevêque de Reims en 1931, cardinal en 1935, il reçoit sa nomination comme archevêque de Paris le 8 mai 1940 ; dès le mois de juillet de la même année, l'archevêché est l'objet de perquisitions allemandes ; en février 1941, il refuse l'offre que lui fait le gouvernement de Vichy d'être membre du Conseil national.

Ayant pris conscience, tout particulièrement dans son diocèse de Reims, de la « déchristianisation », il forme le projet de créer des équipes de prêtres (au lieu de laisser les curés isolés) et estime que ce problème urgent de la désaffection de nombre de Français par rapport à la foi ne doit plus être envisagé du point de vue de chaque diocèse mais à l'échelon national. Pour réaliser une meilleure répartition en prêtres entre diocèses riches et diocèses pauvres et pour former des prêtres adaptés aux régions les plus déchristianisées, il propose, le 24 juillet 1941, à l'Assemblée des cardinaux et archevêques de France de fonder une institution interdiocésaine : la Mission de France. Celle-ci s'établit à Lisieux, à côté du Carmel, le cardinal Suhard ayant voulu lier cette fondation à la mystique qui avait pris une forte conscience de l'incroyance moderne.

En 1943, il lit la description établie par deux jeunes prêtres de Paris (H. Godin et Y. Daniel) de l'état de déchristianisation de son diocèse, texte qui deviendra le livre France, pays de mission ? Il décide de former un organisme diocésain, la Mission de Paris ; plusieurs prêtres de l'institution s'embauchent comme ouvriers ; par ailleurs, d'autres prêtres partent clandestinement pour l'Allemagne avec le Service du travail obligatoire (S.T.O.), au sein duquel ils connaîtront une situation qui prépare et assure d'une certaine manière l'expérience célèbre des prêtres-ouvriers.

À la Libération, le cardinal Suhard, qui avait paru s'opposer trop faiblement au régime de Vichy, est exclu de la cérémonie d'actions de grâces célébrée à Notre-Dame de Paris.

En février 1947, il publie une lettre pastorale retentissante : Essor ou déclin de l'Église ?, dans laquelle il pose clairement le problème de l'avenir de la foi chrétienne en France, mais qui indispose les chrétiens traditionalistes et les milieux romains. Le Saint-Office ayant demandé un rapport sur les prêtres-ouvriers, le cardinal Suhard fait tout pour que ceux-ci obtiennent de Rome les franchises dont ils ont besoin.

Il publie une nouvelle lettre importante en février 1948 (Le Sens de Dieu) et fait un voyage à Rome, en novembre, pour défendre les prêtres-ouvriers. Sa dernière lettre (avril 1949) a pour titre Le Prêtre dans la cité. Il meurt le 30 mai 1949 sans avoir pu prononcer le texte qu'il avait écrit pour des étudiants, texte où il proposait « la dialectique de l'amour » (« l'amour se prouve en aimant ») et où il invitait les jeunes chrétiens à concilier « la rigueur scientifique, l'efficience technique, avec la foi en Dieu et la confiance en l'homme ».

— Jean-François SIX

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Pour citer cet article

Jean-François SIX. SUHARD EMMANUEL, cardinal (1874-1949) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MISSION DE FRANCE

    • Écrit par Universalis
    • 411 mots

    Institution interdiocésaine créée, le 24 juillet 1941, par les cardinaux et archevêques de France. Dans la décennie qui avait précédé, l'épiscopat français avait en effet pris conscience de ce qu'on a appelé la déchristianisation : l'abandon de la pratique religieuse par un grand nombre de catholiques,...

  • PRÊTRES-OUVRIERS

    • Écrit par Universalis
    • 823 mots

    On donne volontiers le titre de prêtre-ouvrier à tout prêtre qui sait se faire proche et compréhensif, attentif à la vie ordinaire et aux difficultés des petites gens, même s'il n'exerce pas un emploi salarié. Pourtant, nombre de prêtres au travail ne souhaitent pas s'appeler ainsi, soit qu'ils...