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DIDACHÈ ou DIDAKHÈ

La Doctrine des Apôtres, ou Didachè, n'est connue dans son texte original que depuis 1873 (par la découverte à Constantinople d'un manuscrit du xie siècle, maintenant à la bibliothèque du patriarcat grec de Jérusalem). Dès la publication de ce texte (1883), la Didachè a suscité la plus vive curiosité à cause de sa haute antiquité et des questions qu'elle pose et qui ne sont pas encore résolues : on a parlé de l'« énigme de la Didachè ». L'ouvrage porte dans le manuscrit un double titre : Doctrine des Apôtres et Doctrine du Seigneur aux païens par les douze Apôtres. Ce texte, très court, comporte deux parties : un enseignement moral d'après le thème des « deux voies » (i-vi) ; des prescriptions sur le baptême (vii), le jeûne et la prière (viii), sur l'agape et l'eucharistie (ix-xii), sur les prophètes, les épiscopes et les diacres (xiii-xv). Le dernier chapitre exhorte les fidèles à se tenir dans l'attente du Seigneur. Il ne s'agit pas, en tout cela, d'une catéchèse baptismale ni d'une collection canonique mais d'un recueil d'instructions d'un « apôtre » (missionnaire) à l'intention de ses communautés. Comme d'autres recueils analogues, la Didachè se réclame de la tradition et de l'autorité des douze Apôtres.

La date de la Didachè a été l'objet de longues discussions qui n'ont pas encore fait l'unanimité des savants. Lors de la découverte du manuscrit, on a voulu dater l'ouvrage des années 80 à 100. Mais des rapprochements avec la Lettre de Barnabé, et même avec le Pasteur d'Hermas, ont fait penser à une influence de ces derniers écrits sur la Didachè, et amené à retarder la date de celle-ci jusqu'à 120, 130 et même 160. Certains même ont voulu voir dans la Didachè des traces de montanisme et l'ont repoussée jusqu'au début du iiie siècle. Des travaux plus récents (J. P. Audet) ont reconnu à la Didachè et au pseudo-Barnabé une source commune, une catéchèse juive, Les Deux Voies, qui présente une étroite parenté littéraire et doctrinale avec la Règle de la Communauté de Qumrān, et dont il existe d'ailleurs une très ancienne traduction latine. L'auteur de la Didachè aurait utilisé un remaniement chrétien de cette catéchèse et il y aurait ajouté des enseignements à l'usage de ses communautés. On pourrait alors donner à la Didachè une date beaucoup plus ancienne, peut-être 50 à 70, en tout cas 80 à 100. Son origine n'est pas à chercher en Égypte, mais en Syrie ou en Palestine.

Bien qu'il ne faille pas déceler dans la Didachè une tendance archaïsante, la situation qu'elle décrit est certainement très ancienne : le Christ y est appelé « Serviteur de Dieu » ; les prophètes, « apôtres » et prédicateurs itinérants y tiennent une grande place à côté de la hiérarchie sédentaire, épiscopes et diacres ; le baptême est administré dans l'eau courante, mais bien « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ».

Les « prières eucharistiques » des chapitres ix et x, très proches des prières juives, sont des prières pour la bénédiction de la table ; la liturgie eucharistique (« fraction du pain », le « jour du Seigneur ») n'apparaît qu'au chapitre xiv ; elle doit être précédée de la confession des péchés (il ne s'agit évidemment pas de la confession sacramentelle).

La Didachè était considérée comme « Écriture » en Égypte (par Clément d'Alexandrie, Origène, Athanase). Elle fut reprise dans des compilations postérieures (Didascalie, Constitutions apostoliques).

— Pierre Thomas CAMELOT

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Pierre Thomas CAMELOT. DIDACHÈ ou DIDAKHÈ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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