Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

TROTZIG BIRGITTA (1929-2011)

Romancière et nouvelliste suédoise, née en 1929 à Göteborg, Birgitta Trotzig, qui a passé une partie importante de sa vie en France, s'est imposée par des ouvrages pénétrants qui la font proche de Bernanos ou de Mauriac, aux options religieuses desquels elle se rallie. Dès son premier ouvrage, Extraits de la vie des amants (1951), elle a trouvé la formule qui fera son renom : dans une époque reculée, imprécise, évoluent des personnages réprouvés que cette visionnaire, à la fois mystique et réaliste, campe par touches abruptes et symboliques qui évoquent les images de vitraux du Moyen Âge. Mais Les Réprouvés (1957), Un paysage (1959) et, surtout, L'Accusation (1966, la traduction exacte du titre suédois serait La Trahison), La Maladie (1972), La Fille du roi crapaud (1985) et des récits historiques tels que Porträtt (1993) et Levande och döda i kejsarinstid (1993) sont aussi et surtout une méditation pudique sur notre monde sans amour, fait de solitude et d'étrangeté, où l'homme fomente ou subit la haine dans une atmosphère fruste et comme raréfiée. La pauvreté, matérielle et surtout spirituelle, y est au premier plan, désespoir, trahison et peur constituant la trame d'existences en apparence déchues. Mais la perspective chrétienne y est pourtant bien présente. Ce manque, cette absence qui désolent les personnages sont à lire en creux, dans l'esprit qui inspira Le Livre de Job. Ils témoignent d'une attente, et, par un juste renversement des valeurs, de cette transfiguration qui, en nous faisant mourir à nous-mêmes, nous fait naître pour autrui, en particulier pour ce Quelqu'un d'autre dont la figure suffit à nous faire distinguer entre le faux et le vrai amour. Œuvre grave et tissée d'un bout à l'autre de symboles magnétiques dans leur réaliste simplicité, les « légendes » qu'écrit Birgitta Trotzig, dans l'austérité des décors et des cœurs et le dénuement extrême des personnages qui les animent, témoignent magnifiquement d'une attente de Dieu « de l'autre côté des ténèbres ». Cette attirance pour les images qui gouvernent notre vie secrète lui a également inspiré de beaux poèmes en prose (Anima, 1982 ; Sammanhang, 1996), traduits en français sous le titre Contexte/Matériaux (2003).

— Régis BOYER

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur émérite (langues, littératures et civilisation scandinaves) à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Régis BOYER. TROTZIG BIRGITTA (1929-2011) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Voir aussi