Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

DHÔTEL ANDRÉ (1900-1991)

Des Ardennes, où il a vu le jour, dans la ville d'Attigny, André Dhôtel a gardé le sens d'un merveilleux très quotidien et du goût pour les choses de la terre. Tout jeune, il a été profondément marqué par un autre Ardennais : Arthur Rimbaud, auquel il consacre un essai en 1933 : L'Œuvre logique de Rimbaud. Il y reviendra dans sa maturité avec Rimbaud et la révolte moderne (1952). En 1930, il publie un premier roman : Campements. Professeur de philosophie en Grèce puis en France, Dhôtel produit une œuvre abondante : une cinquantaine de titres dont quelque trente romans. Parmi ceux-ci, le plus célèbre demeure Le Pays où l'on n'arrive jamais, qui a reçu le prix Fémina en 1955, et qui a pris place, à côté du Grand Meaulnes, parmi les livres qui s'adressent à la fois au public des adultes et des enfants.

Au-delà de Rimbaud, André Dhôtel se rattache à la grande tradition des romantiques allemands. D'un livre à l'autre, les mêmes thèmes parcourent son œuvre : regrets du passé, nostalgie d'un ailleurs où la vie serait conforme aux rêves d'enfance, communion avec la nature. Mais où les romantiques ont volontiers une vision tragique de l'univers, Dhôtel peint le monde aux couleurs du bonheur : il montre tant de tendresse envers ses personnages qu'il leur évite toujours le pire. Ce romancier régionaliste est aussi un utopiste. Le Village pathétique (1943), Les Rues dans l'aurore (1945), Les Chemins du long voyage (1949), Pays natal (1960), L'Azur (1969), Le Soleil du désert (1973) et Bonne nuit Barbara (1979) mettent en scène des personnages à l'aise dans la vie car, n'écoutant que leurs instincts, ils savent encore distinguer ce que celle-ci comporte de merveilleux. Un recueil de proses poétiques, La Chronique fabuleuse (1955), livre l'art de vivre d'André Dhôtel. Comme dans Les Nourritures terrestres, de Gide, l'auteur s'adresse à un jeune garçon, Martinien. Mais il ne lui enseigne pas à courir le monde. Non, pour Dhôtel, il suffit d'ouvrir les yeux, d'observer la nature, les animaux et de prêter attention aux autres hommes pour découvrir le bonheur. Dhôtel pense que le bonheur de chacun réside en lui-même. Ainsi les deux enfants du Pays où l'on n'arrive jamais s'enfuient-ils de chez eux pour abolir le présent. Ils rêvent d'un pays où passé et futur se confondraient. Et c'est par une sorte de protestation sociale que les deux héros, loin de la confortable demeure paternelle, trouvent cette contrée magique dans une roulotte de bohémiens, parmi les vagabonds et les forains. Cette faculté d'émerveillement amène Dhôtel à frôler le fantastique proprement dit avec Les Aventures de Julien Grainebis (1958) ou Le Neveu de Parencloud (1960). Il garde cependant ses distances, car il n'a nul besoin de faire appel à tout l'arsenal du genre : la réalité cachée de la vie de tous les jours lui suffit à créer une atmosphère insolite (Vaux étranges, 1986).

Dans ses derniers livres, Dhôtel semble opérer une sorte de retour aux sources. Coup sur coup, deux ouvrages chantent les Ardennes : Terres de mémoire et Lointaines Ardennes (1979). Au fond, le romancier n'a peut-être jamais fait qu'exalter les charmes et les maléfices d'une province dans laquelle il se sent profondément enraciné. Cela est, en partie, confirmé par Je ne suis pas d'ici (1982) où les Ardennes se trouvent, une fois encore, sollicitées. Mais Des trottoirs et des fleurs (1981) faisait appel à la veine plus utopique que régionaliste de Dhôtel.

— Jean-Pierre ÉNARD

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Jean-Pierre ÉNARD. DHÔTEL ANDRÉ (1900-1991) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Voir aussi