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REMIZOV ALEXEÏ MAXIMOVITCH (1877-1957)

Écrivain russe, Alexeï Remizov renonce assez vite à ses idées socialistes (qui lui ont valu une condamnation quand il était étudiant) pour une pensée religieuse et nationaliste proche de celle de Dostoïevski (son maître, avec Leskov et Gogol). Ami de Blok, il participe au mouvement symboliste.

En 1921, hostile aux bolcheviks, il émigre et, après un séjour à Berlin, s'installe à Paris. Il y meurt presque aveugle dans la misère et totalement isolé depuis la mort de sa femme en 1943, après avoir toute sa vie souffert d'un exil qu'il ne pouvait supporter. Dès sa première œuvre en 1907, Remizov apparaît comme un écrivain ésotérique pour qui activité littéraire et vie sont un jeu, comme en témoignent son goût pour la mystification et les diables peints et découpés dont il s'entoure. Son amour pour la vieille Russie, que ses voyages dans des régions reculées lui ont fait connaître, son intérêt pour l'histoire, la paléographie, le folklore, la civilisation russe d'avant Pierre le Grand orientent son œuvre : ce sont des transpositions de mystères, apocryphes, vies de saints, légendes et bien sûr des contes russes. Remizov abandonne le récit classique et l'ordre chronologique ; il adopte une composition complexe, faite de juxtapositions. Dans ses romans, mélanges de descriptions réalistes, de grotesque et de fantastique, le réel et l'imaginaire se mêlent en un chaos qui est celui de la Russie éternelle, aux mœurs inhumaines, où règne le Malin qui écrase « les petits hommes » : L'Étang (Prud, 1908), La Pendule (Časy, 1908), Les Sœurs en croix (Krestovye Sëstry, 1910). Remizov laisse aussi un grand nombre de souvenirs : Les Yeux tondus (Podstrižennymi glazami, 1951). Il représente l'émigration russe des années 1930 à Paris dans Maître de musique (Učitel' muzyki). Ce livre écrit entre 1931 et 1939 ne paraîtra que dans les années 1980 en compagnie d'autres romans autobiographiques tels que Le Casson et La Ravine de Pétersbourg écrits dans les années 1930. Il renouvelle le lexique en utilisant archaïsmes, langue d'Église, langue populaire, néologismes, glissements de sens : pour lui, le mot, qu'il calligraphie, a sa vie propre. Il renouvelle la syntaxe, rêvant d'un russe « libéré de la grammaire allemande ». Cette prose, où le primat est donné à la langue, dite prose ornementale, a fait de Remizov le maître, avec A. Bely, des grands prosateurs des années 1920 : Zamiatine, Pilniak, les Frères de Sérapion, les jeunes Leonov et A. Tolstoï.

— Alexis BERELOWITCH

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître de conférences à l'université de Paris-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Alexis BERELOWITCH. REMIZOV ALEXEÏ MAXIMOVITCH (1877-1957) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • RUSSIE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par Michel AUCOUTURIER, Marie-Christine AUTANT-MATHIEU, Hélène HENRY, Hélène MÉLAT, Georges NIVAT
    • 23 999 mots
    • 7 médias
    ...le goût, la senteur, les rythmes de la vie russe sont portés par l'enchantement de la mémoire à une sorte d'ivresse lourde et épicée. C'est en exil que Remizov, styliste facétieux et perspicace du folklore russe, rédige ses légendes envoûtantes, et son livre de Mémoires « à fleur d'yeux » : ...

Voir aussi