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THÉÂTRE AMATEUR

L'image du théâtre amateur en France est en pleine transformation. Parce qu'il a beaucoup évolué, mais surtout, paradoxalement, parce qu'il s'est retrouvé lui-même. Après avoir été très longtemps ignoré, en effet, ce théâtre est désormais sur le devant de la scène. En 1996 paraissait une grande enquête du Département des études et de la prospective (D.E.P.) sur les activités artistiques en amateur. En 1998, au moment où se créait au ministère de la Culture et de la Communication un « bureau des pratiques amateurs », un peu avant le protocole d'accord avec le ministère de la Jeunesse et des Sports, tutelle officielle de ces pratiques, commençait au C.N.R.S., dans un laboratoire dédié aux arts du spectacle, une réflexion collective sur un mode d'exercice du jeu dramatique jusque-là presque totalement négligé par les spécialistes. La sociologie, seule discipline à s'intéresser au théâtre amateur, ne le distinguait pas de l'ensemble composite de toutes les formes où les acteurs ne sont pas des professionnels (théâtre scolaire, stages de communication, théâtre d'agitation, etc.).

Un théâtre à part entière

Pourtant, amateur ne signifie pas seulement non-professionnel. Ni débutant. Pour qu'une activité dramatique relève du théâtre amateur – ou d'amateurs, selon la formule encore en usage dans les années 1950 –, trois conditions doivent être remplies, en plus du caractère non lucratif : le théâtre doit être le but principal de l'activité ; la relation à un public doit être inscrite dans la perspective à plus ou moins long terme des participants ; enfin, la structure dans laquelle l'activité s'inscrit doit être elle-même amateur (la participation individuelle d'acteurs inexpérimentés ou de véritables amateurs à un spectacle professionnel ne relève pas de cette catégorie).

Le texte de référence est le décret du 19 décembre 1953, toujours en vigueur malgré ses lacunes, et dont la révision est en cours. Strictement économique et juridique (est amateur l'acteur qui n'est pas rétribué), la définition alors formulée sous la pression de professionnels inquiets d'une éventuelle concurrence a contribué à faire passer l'amateurisme pour une simple pratique de loisir, c'est-à-dire, pour un non-professionnalisme. Il a fallu attendre la fin des années 1990 et la grande interrogation sur les « pratiques culturelles », l'échec apparent de leur démocratisation et la valeur des grilles de lecture utilisées, pour que son étonnante vitalité soit considérée d'un œil neuf et véritablement étudiée : au-delà du besoin non négligeable de divertissement, elle témoigne d'un goût puissant et largement partagé pour une pratique collective directe de la scène et atteste l'existence en ce domaine d'une mémoire diffuse mais active. Deux théâtres, en effet, se sont développés parallèlement en Europe : un théâtre professionnel fondamentalement itinérant et marginal et un théâtre amateur qui était un théâtre de centre, jouant un rôle essentiel dans l'entretien des valeurs et des codes communs. Ils ont évolué selon une complémentarité complexe. Il n'existe donc pas un modèle unique, avec une forme pure et une forme dégradée, mais deux modèles distincts, aussi légitimes l'un que l'autre. Ce qui caractérise le théâtre des amateurs est que son ludisme parfois audacieux se manifeste sans solution de continuité avec la scène du social.

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Écrit par

  • : chargée de recherches au C.N.R.S. (laboratoire Arias), chargée de cours à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle (I.E.T.)

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Pour citer cet article

Marie-Madeleine MERVANT-ROUX. THÉÂTRE AMATEUR [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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