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DROUIN RENÉ (1905-1979)

Né à Pantin, René Drouin fut d'abord élève à l'École spéciale d'architecture puis, dans les années 1930, dessinateur de mobilier contemporain. En 1939, il abandonne la décoration pour ouvrir à Paris (en association avec un autre débutant, Leo Castelli) une galerie de peinture au 17, place Vendôme. Lieu prestigieux, entreprise d'abord modeste qui ne trouve son sens que vers 1944. Drouin y présente les peintres de la « tradition française » semi-abstraite (Manessier, Le Moal, Singier...), puis s'intéresse à l'avant-garde, découvre Fautrier, expose Wols, contribue au lancement d'un Dubuffet alors plus occupé de créations truculentes que de théorie anticulturelle. La galerie de la place Vendôme accueille aussi (1949) une rétrospective Picabia (Cinquante Ans de plaisir), puis la première exposition de Max Ernst à son retour des États-Unis (1950). L'une et l'autre se heurtent à l'indifférence, voire à l'hostilité des milieux critiques, alors partagés entre l'« école de Paris » (dans ses tendances les plus figuratives) et la vogue recommencée de l'abstraction géométrique. La liberté dont fait preuve René Drouin en exposant également Kandinsky (mort en 1944) ne lui concilie pas les amateurs d'opinions tranchées.

Il est cependant soutenu par des écrivains tels que Jean Paulhan, André Malraux, Jean-Paul Sartre et Henri Michaux (dont il sera également le premier à exposer les gouaches et les encres aux confins de l'onirisme) aussi bien que Georges Limbour ou Marcel Arland. Certains des artistes qu'il a « lancés » (Fautrier, avec l'exposition des Otages en 1945) ou relancés (Bissière) deviennent célèbres, mais Drouin demeure un homme de culture plutôt que de commerce. Sensible à l'aventure d'autrui plus qu'à la sienne propre, il doit affronter une situation financière vite inextricable et, peu doué pour la publicité, fermera sa galerie alors que ses caves contiennent des centaines de toiles qui vaudraient plus tard des fortunes, et dont à l'époque personne ne veut.

En 1954, aidé d'amis fidèles, il rouvre une minuscule galerie rue Visconti. Il y présentera de nouveaux talents : Claude Georges, Sonderborg, Cuixart, Bettencourt, Viseux... Mais cette tentative ne pourra se prolonger au-delà des années 1960. René Drouin (qui avait souvent fait de ses catalogues de véritables ouvrages d'art) s'occupa davantage d'édition, retourna à son premier métier (la décoration), tout en conseillant des collectionneurs : l'État fit appel à lui pour l'organisation de l'Exposition universelle de Montréal (1967). Il s'intéressa encore au projet de création du Centre Georges-Pompidou mais il consacra surtout ses dernières années à la rédaction de notes sur ce qui avait été la passion de sa vie : le mystère de la création artistique.

— Gérard LEGRAND

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Gérard LEGRAND. DROUIN RENÉ (1905-1979) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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