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GÖBEKLI TEPE, site archéologique

Le site de Göbekli Tepe en Turquie, qui date d’environ 9000 avant notre ère, est l’une des grandes découvertes archéologiques de ces dernières décennies. Inscrit en 2018 sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO (World Heritage List), il comprend d'impressionnantes constructions circulaires mégalithiques parfois considérées comme « les premiers temples de l’humanité ». Connu depuis les années 1960 mais non identifié comme tel, le site a commencé à être fouillé de manière intensive par une mission de l’Institut archéologique allemand (DAI) sous la direction de l’archéologue Klaus Schmidt (1953-2014). Le toponyme turc signifie « colline du nombril ». De fait, Göbekli Tepe se trouve sur une éminence dominant la plaine à environ 800 mètres d’altitude, dans une zone de collines et de steppes, à près de 15 kilomètres au nord-est de la ville turque d’Urfa, à proximité de la frontière syrienne et à la limite du Kurdistan turc. Il couvre environ neuf hectares et comprend jusqu’à 15 mètres de couches archéologiques – le mot tepe, comme le mot tell en arabe, désigne les collines artificielles dues à l’accumulation des vestiges.

Des constructions sans équivalent

Göbekli Tepe, Turquie - crédits : Jean-Paul Demoule

Göbekli Tepe, Turquie

Il s’agit d’un site pour l’essentiel cérémoniel, dont l’utilisation s’est échelonnée sur plusieurs siècles, à partir de la moitié du Xe millénaire avant notre ère. La principale et première période d’occupation de Göbekli Tepe se situe entre 9600 et 8800 avant notre ère et appartient à ce qu’on appelle le PPNA (Pre-PotteryNeolithic A). Ce moment culturel caractérise tout le Levant, du nord du Sinaï au sud-est de la Turquie, et voit apparaître les prémices de l’agriculture, laquelle ne sera véritablement développée qu’à la période suivante, le PPNB. À l’inverse d’autres régions du monde, la poterie n’y a pas été inventée avec l’agriculture ou précédemment : elle n’apparaîtra qu’au cours du VIIe millénaire.

Stèle ornée, Göbekli Tepe - crédits : Vincent Musi/ National Geographic Creative/ Bridgeman Images

Stèle ornée, Göbekli Tepe

Cette première période d’occupation du site voit l’érection de grandes constructions circulaires d’une vingtaine de mètres de diamètre. Grâce à des prospections géophysiques de surface, une vingtaine d’entre elles ont été reconnues, dont quatre principales ont été en grande partie fouillées. Le sol de ces constructions est en terrazzo, agglomération de petites pierres et de mortier. Les parois sont en pierres sèches sans mortier, d’environ un mètre d’épaisseur. Parfois doublées, voire triplées, elles forment ainsi des cercles concentriques irréguliers. Le long de ces murs sont insérées perpendiculairement des stèles, piliers plats en calcaire d’environ trois mètres de hauteur, de vingt à trente centimètres d’épaisseur en moyenne, en forme de T. Plus de la moitié d’entre elles comportent des représentations, en léger bas-relief, d’animaux sauvages, de sexe presque toujours mâle quand il peut être identifié. On reconnaît des lions, des sangliers, des renards, des ours, des onagres, des taureaux, des vautours, mais aussi des scorpions, des serpents (l’animal le plus fréquent), des varans, des grues, des cigognes, des ibis, des canards, soit une grande partie de la faune qui peuplait la région à l’époque.

Au centre de chaque construction se dressaient deux stèles face à face, également en forme de T et mesurant environ cinq mètres de hauteur, donc plus hautes que les autres. Des bras humains y sont figurés, toujours en léger bas-relief, sur les longs côtés de chaque stèle et se terminent en mains presque jointes sur l’un des petits côtés, au-dessus d’une ceinture également figurée. Il s’agit donc de représentations anthropomorphes. Mais aucun visage ni aucun autre élément du corps ou du costume n’étant indiqué, il est difficile d’aller plus loin dans l’interprétation et de préciser leur nature ou fonction (ancêtres, chefs, êtres surnaturels ou autres personnages).[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France

Classification

Pour citer cet article

Jean-Paul DEMOULE. GÖBEKLI TEPE, site archéologique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Plan du site de Göbekli Tepe - crédits : Encyclopædia Universalis France

Plan du site de Göbekli Tepe

Stèle ornée, Göbekli Tepe - crédits : Vincent Musi/ National Geographic Creative/ Bridgeman Images

Stèle ornée, Göbekli Tepe

Göbekli Tepe, Turquie - crédits : Jean-Paul Demoule

Göbekli Tepe, Turquie

Autres références

  • CHASSEURS-CUEILLEURS (archéologie)

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE
    • 4 727 mots
    • 3 médias
    ...les pratiques rituelles ne laissent pas nécessairement de traces reconnaissables. On considère néanmoins les constructions circulaires mégalithiques de Göbekli Tepe, dans le sud de la Turquie, remontant à environ 9 500 avant notre ère, juste au moment de l’émergence du Néolithique, comme les « premiers...
  • FIGURATION, paléolithique et néolithique

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE
    • 4 571 mots
    • 6 médias
    ...semblent plutôt relever de cultes domestiques, sont élevées les premières constructions à but exclusivement cérémoniel et sans doute religieux. Ainsi, à Göbekli Tepe (Turquie), une vingtaine de constructions circulaires en pierres sèches, d’une vingtaine de mètres de diamètre, englobaient dans leurs murs...

Voir aussi