PARENT CLAUDE (1923-2016)
Architecte marginal, designer inventif, polémiste, Claude Parent est l'une des figures les plus controversées de l'architecture française de l'après-guerre. Ses projets, ses réalisations, comme ses écrits en font un opposant permanent aux académismes de cette période et, à ce titre, un des architectes les plus stimulants.
Né le 26 février 1923 à Neuilly-sur-Seine, Claude Parent s'oppose rapidement à l'enseignement sclérosé de l'École des beaux-arts de Paris ; en 1949, avec Ionel Schein, il demande à Georges-Henri Pingusson d'y diriger un atelier libre. Jusqu'en 1955, il dessine et construit avec Schein plusieurs maisons individuelles, prétextes pour les deux jeunes architectes à une réflexion sur l'espace de l'habitation ainsi que sur les matériaux. La rencontre d'André Bloc constitue la seconde étape décisive dans la carrière de Parent : accueilli par celui-ci au comité de rédaction de L'Architecture d'aujourd'hui, il intègre dans le même temps le groupe Espace, où il fréquente notamment Fernand Léger, Sonia Delaunay et Vasarely. Le travail de Parent évolue au gré des rencontres : rien de commun en effet entre la maison d'André Bloc à Antibes (1959) ou la Maison de l'Iran à la Cité universitaire de Paris (1961, avec M. Foroughi, H. Ghiaï et A. Bloc), bâtiments à ossature métallique d'une extrême sobriété, et les bunkers réalisés quelques années plus tard. Son amitié avec Paul Virilio – ils fondent le groupe et la revue Architecture principe – le conduit en effet vers une réflexion sur l'enveloppe de béton brut, mais aussi sur la fonction oblique, théorie énoncée en 1964 et publiée par Parent sous le titre Vivre à l'oblique (1970). Outre quelques démonstrations spectaculaires comme de mémorables conférences prononcées sur un sol oblique, le centre paroissial Sainte-Bernadette à Nevers (1963-1966) et les centres commerciaux de Reims-Tinqueux, Sens ou Ris-Orangis (1969-1971), constituent les témoignages les plus remarquables de cette période.
Partant du postulat que l'architecture crée le site, Claude Parent poursuit son travail – proche de la sculpture – sur la structure et son épiderme en participant à la conception (en collaboration avec d'autres architectes et des ingénieurs d'E.D.F.) de plusieurs centrales nucléaires au début des années 1980 (Paluel, Cattenom, Chooz). Les dessins qu'il a produits à cette occasion comptent parmi les meilleurs exemples de l'imaginaire poétique de Parent. On retrouve cette dimension, portée à son paroxysme, dans les projets utopiques de l'architecte, établis en régulière collaboration avec des artistes : Yves Klein, Nicolas Schöffer ou encore Jean Tinguely, avec qui il projette le Lunatrack, tour de cent mètres de haut pour la porte Maillot (1960).
S’il reçoit en 1979 le grand prix national d’architecture, Claude Parent demeure en marge de la profession. Il se refuse à édifier des ensembles de logements, inévitablement normés ; il préfère imaginer des « villes cônes éclatées », des « villes spirales », cités improbables où le principe de la vie à l'oblique est néanmoins justifié par des antécédents historiques et géographiques. Hostile au régionalisme comme au désurbanisme, amoureux des villes, Claude Parent a, paradoxalement, surtout construit à leur périphérie. Cet amateur de théâtre – qui n'a pas hésité à mettre sa vie en scène – s'est vu confier en 1987, par l'actrice Silvia Monfort, la réalisation d'un théâtre sur le site des anciens abattoirs de Vaugirard à Paris : œuvre à part, cette tente métallique ceinturée d'un ruban rouge semble cependant significative de sa dernière période, celle d'une tentation déconstructiviste, plus manifestement exprimée au centre d'animation de l'aéroport de Roissy (1995) et à la mairie de Lillebonne, livrée en 1998. La collaboration de Claude[...]
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Écrit par
- Simon TEXIER : professeur, université de Picardie Jules-Verne
Classification
Média
Autres références
-
VIRILIO PAUL (1932-2018)
- Écrit par Simon TEXIER
- 851 mots
Paul Virilio est né à Paris le 4 janvier 1932. Une formation de maître-verrier le conduit à travailler aux côtés du peintre Serge Rezvani au couvent de la Clarté-Dieu à Orsay et de Léon Zack à Notre-Dame-des-Pauvres, à Issy-les-Moulineaux (1954-1956). Il s’initie également à la philosophie et à...