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RADITCHKOV YORDAN (1929-2004)

Parfois surnommé le « Kafka bulgare », Yordan Raditchkov a manié l'absurde, le burlesque et le tragique tout au long de son œuvre. Né en 1929 dans le petit village de Kalimanitsi, au nord-ouest de la Bulgarie, il commence sa carrière comme correspondant en province pour plusieurs journaux. Critique littéraire, il écrit également des scénarios pour le Studio national de la cinématographie. En 1959, il publie son premier ouvrage, un recueil de nouvelles intitulé Le cœur bat pour les hommes. À cette époque, la Bulgarie vit une période de glaciation sous le régime de Todor Jivkov, au pouvoir de 1954 à 1989. Le pays est lui-même appelé « la seizième république de l'Union soviétique », tant Sofia est totalement inféodée à Moscou. En 1968, il tourne un film d'après une de ses nouvelles, Le Ballon captif. À la suite de la première projection, le film est retiré. En 1988, une de ses pièces de théâtre est interdite à Sofia et aussitôt représentée à Skopje, dans la Macédoine titiste voisine.

Sous le communisme, les œuvres de Raditchkov défient la censure en recourant à des allusions qui cachent une ironie délicate contre le pouvoir. En plus de quarante ans, il va publier une quarantaine de romans, de pièces de théâtre, de nouvelles, traduits dans vingt langues, dont le français (Les Cours obscures, 1980 ; L'Herbe folle, 1994 ; Nous les moineaux, 1997 ; Les Récits de Tcherkaski, 1998 ; La Barbe du bouc, 2001). Ses pièces de théâtre sont montées en U.R.S.S., en Europe occidentale et aux États-Unis.

Mêlant le burlesque et le tragique, son style est proche de la fable avec un goût certain pour l'absurde. Yordan Raditchkov disait qu'il travaillait à la manière d'Ésope et de La Fontaine. Son univers littéraire est également imprégné de surnaturel. La Bulgarie est une vieille terre rurale de sorciers et de rebouteux et l'auteur s'est largement inspiré des mœurs paysannes de son village d'origine et de sa région.

Au printemps 1989, quelques mois avant la chute du régime de Todor Jivkov, Raditchkov participe au petit déjeuner offert par le président Mitterrand, en voyage officiel en Bulgarie, à une douzaine de dissidents, dont la poétesse Blaga Dimitrova et le futur président Jeliou Jelev. Pourtant en 1991, il est élu député sur les listes du parti socialiste, ex-communiste. Il avait brièvement rejoint les socialistes dans une optique gorbatchévienne et parce qu'il craignait le revanchisme de certaines factions des démocrates. Mais il ne siégera pas au parlement et démissionnera rapidement de son mandat. Peu avant sa mort, il gardait espoir en la transition démocratique de son pays : pour lui, désormais, la Bulgarie n'était plus isolée dans le concert des nations.

— Christophe CHICLET

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Écrit par

  • : docteur en histoire du xxe siècle de l'Institut d'études politiques, Paris, journaliste, membre du comité de rédaction de la revue Confluences Méditerranée

Classification

Pour citer cet article

Christophe CHICLET. RADITCHKOV YORDAN (1929-2004) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BULGARIE

    • Écrit par Roger BERNARD, André BLANC, Christophe CHICLET, Nadia CHRISTOPHOROV, Universalis, Jack FEUILLET, Vladimir KOSTOV, Edith LHOMEL, Robert PHILIPPOT
    • 26 995 mots
    • 12 médias
    ...(1919), qui se caractérise par la nouveauté de son écriture et l'évocation pleine de fraîcheur des mœurs et du langage des paysans rhodopiens. Quant à Jordan Radickov (1929), il s'attache à l'homme primitif, et, mêlant le réel et le fantastique, crée des personnages souvent dérangeants. Là encore, comme...

Voir aussi