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GRMEK MIRKO DRAŽEN (1924-2000)

Historien des sciences et de la médecine, Mirko Dražen Grmek est né en 1924 à Krapina (alors ville du royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes, aujourd'hui en Croatie). Après des études secondaires à Zagreb, il entre à l'École polytechnique du Royaume d'Italie. Cette expérience de jeunesse fut dure et formatrice : le jeune homme, déjà plurilingue, ajouta la corde italienne à son arc, et le savant européen naquit ainsi. La guerre en effet dispersa l'École, Grmek rallia les partisans, connut divers camps suisses et devint officier des troupes alliées. De retour à Zagreb, il entreprit ses études de médecine et devint docteur en médecine (1951), puis docteur ès sciences médicales (1958). Renonçant à la pratique hospitalière, il se consacra professionnellement à l'histoire de la médecine, établissant la Bibliographia medica Croatica (1955), puis fondant à Zagreb l'Institut d'histoire des sciences, en 1960.

En 1962, ses premiers travaux lui ayant rapidement acquis une notoriété internationale, il obtint une bourse du Collège de France pour lire et classer les papiers de Claude Bernard, dont il établira le catalogue (1967), comme plus tard pour Laennec (1982). Il quitta bientôt l'étouffante Yougoslavie pour Paris (1963), devint Français en 1967 et soutint en Sorbonne une thèse ès lettres consacrée au raisonnement expérimental de Claude Bernard (1971). Il fut parallèlement chargé de conférences à l'École pratique des hautes études (1971), sous la direction de Pierre Huard, auquel il succéda en 1973. Admis à faire valoir ses droits à la retraite en 1989, il choisit Danielle Gourevitch pour successeur.

Quatre thèmes en matière d'histoire des sciences et de la médecine ont particulièrement suscité son attention : les sciences chez les Slaves du Sud, la biologie et la médecine françaises du xixe siècle, la médecine antique et les grandes interrogations médicales du temps présent. À la connaissance de celui-ci, il appliqua la méthode philologique, tandis qu'il éclairait les faits du passé grâce à sa connaissance parfaite de la science contemporaine. Ses livres les plus remarquables sont ainsi : Raisonnement expérimental et recherches toxicologiques chez Claude Bernard, Droz, Genève-Paris, 1973 ; Les Maladies à l'aube de la civilisation occidentale, Payot, Paris, 1983 ; Histoire du sida, ibid., 1989 ; Les Maladies dans l'art antique (avec Danielle Gourevitch), Fayard, Paris, 1998, et une autobiographie intellectuelle, La Vita, le malattie e la storia, De Renzo, Rome, 1998, où il laisse entendre qu'il n'acceptera pas que la maladie puisse le priver de son autonomie. Il dirigea une très importante Histoire de la pensée médicale en Occident, en 3 vol., Seuil, Paris, 1995-1997-1999. Cela parmi 33 ouvrages et avec 339 articles dans des revues scientifiques, des préfaces, des notices de dictionnaires, écrits ou traduits en français, italien, croate, allemand, anglais, japonais, roumain, espagnol, grec, portugais. Il laisse deux concepts nouveaux, ceux de pathocénose et d'iconodiagnostic.

Il appelle, en effet, pathocénose l'ensemble des états pathologiques présents au sein d'une population déterminée à un moment donné. Quant à l'iconodiagnostic, c'est une méthode qui consiste à interroger les images pour compléter le message des mots, pour approfondir l'histoire des maladies, quel que soit le type de civilisation considéré.

Protagoniste dans une discipline qu'il a profondément transformée, Grmek a, par sa générosité scientifique, l'ampleur et l'originalité de ses vues, trouvé des disciples dans tout l'Occident, enseignant également à Berkeley et à Cambridge (Massachusetts), à l'université Harvard, à Ischia, Erice et Rome, à Lausanne et Genève. Il était chevalier de la Légion d'honneur (sur proposition de la section des sciences historiques et[...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études, docteur ès lettres

Classification

Pour citer cet article

Danielle GOUREVITCH. GRMEK MIRKO DRAŽEN (1924-2000) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PATHOCÉNOSE

    • Écrit par Danielle GOUREVITCH
    • 625 mots

    Étymologiquement, pathocénose signifie « communauté de maladies ». La notion et le mot ont été créés par Mirko Grmek pour désigner l'ensemble des états pathologiques présents au sein d'une population déterminée à un moment donné (« Préliminaire d'une étude historique des maladies », in ...

Voir aussi