CHARMES, Paul Valéry Fiche de lecture
Art poétique
La poétique de Valéry est d'abord fondée sur la rigueur, sur le primat de l'intelligence, une subtile alliance entre un sens, un rythme et une signification qu'il appartient au lecteur de faire sienne : « Un beau vers renaît indéfiniment de ses cendres, il redevient – comme l'effet de son effet – cause harmonique de soi-même. » Le poème est compris comme un lieu de réactions psychologiques capables d'engendrer quantité de phénomènes selon les circonstances ou l'individu. Passionné par l'éveil de l'intellect, le poète aspire à saisir une émotion et à en restituer la quintessence par un rythme approprié ; il se dit par exemple marqué par les octosyllabes de Hugo. Au lieu de parler d'inspiration, il préfère chercher « à descendre dans soi-même le plus profondément qu'il soit possible ».
Louange aux dons de l'intelligence, inséparables des abandons que suppose « l'exercice des vers », véritable condensé de l'art poétique comme de l'histoire même du poème, Charmes se donne comme une victoire de l'énergie créatrice sur l'indéfini : « Ces jours qui te semblent vides/ Et perdus pour l'univers/ Ont des racines avides/ Qui travaillent les déserts » (« Palme ») ; il n'y a d'autre mystère que celui qui est récité par le vers souple et laborieux, pas d'autre création que ce projet mené au terme d'une exaltation consciente de son pouvoir et que, à force de maîtrise, sa forme protège de toute altération.
À la lecture de cette œuvre, Rilke lança : « Un jour j'ai lu Valéry, j'ai su que mon attente était finie... » Si Charmes est considéré par certains comme une œuvre sévère sinon froide, le plus grand nombre s'accorde à célébrer les subtiles beautés de ses images comme de ses rythmes. Valéry lui-même, infatigable observateur des ressources de l'esprit, se surprenait de la cohésion du recueil et le plaçait fort haut dans sa production. Sur sa tombe, ce sont deux vers du « Cimetière marin » que l'on grava en hommage : « Ô récompense après une pensée/ Qu'un long regard sur le calme des dieux ».
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Écrit par
- Claude-Henry du BORD
: professeur d'histoire de la philosophie, critique littéraire à
Études , poète et traducteur
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Média