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MOULOUDJI MARCEL (1922-1994)

Marcel Mouloudji (« Moulou ») est né en 1922 dans le quartier de Belleville, à Paris, d'un père kabyle, maçon et communiste, et d'une mère bretonne qui sombrera dans la folie. Son enfance pauvre — il la raconte dans son autobiographie, Le Petit Invité (1989) — est celle d'un « gamin de Paris » qui ne mange pas tous les jours à sa faim. Paris, dont il fera le thème de nombreuses chansons. On hésite à parler de carrière pour ce touche-à-tout (comédien, chanteur, producteur, écrivain, peintre) qui a aimé la paresse, la tendresse gracieuse, le bonheur pacifique et qui, simplement, a su saisir la chance quand elle s'est présentée. Marcel Maillot, directeur de la colonie de vacances du Syndicat du livre, le pousse à chanter avec son frère. Il est bientôt remarqué par Jean-Louis Barrault, qui cherche un enfant pour un spectacle. Mouloudji raconte dans La Fleur de l'âge (1991) comment il fut immergé dans l'entourage de Barrault, comment il fit la connaissance des frères Prévert, du groupe Octobre, de Roger Blin, Robert Desnos, Marcel Duhamel, comment il fut engagé par Dullin au théâtre de l'Atelier. Il joue dans de nombreux films : Jenny de Marcel Carné, La Guerre des gosses de Jacques Daroy, Les Disparus de Saint-Agil de Christian-Jaque, Les Inconnus dans la maison d'Henri Decoin, etc. Il interprète des rôles de sale gosse ou de métèque dans Justice est faite ou Nous sommes tous des assassins d'André Cayatte, mais son activité cinématographique ne se prolongera pas au-delà des années 1950. Pendant l'Occupation, il fréquente Sartre et Beauvoir, qui l'encouragent à écrire, et parvient à échapper au S.T.O.

Après la Libération, son éclectisme va se manifester avec plus de force encore : romancier (Enrico, 1944, prix de la Pléiade), dramaturge (Quatre Femmes, 1947, au théâtre de la Renaissance), poète, et surtout interprète des chansons de Lemarque, Cocteau, Prévert, Trenet, Queneau, Ferré... Lauréat du Grand Prix du disque en 1953, il avait obtenu l'année précédente un énorme succès aux Trois Baudets avec Comme un p'tit coquelicot de Raymond Asso et Claude Valéry. En 1954, il interprète Le Déserteur de Boris Vian le jour même de la chute de Diên Biên Phu : la chanson est immédiatement interdite, mais Mouloudji brave la censure, en édulcorant néanmoins les paroles. Cette veine « procivile », terme qu'il préfère à « antimilitariste », le conduit à des prises de position contre la guerre d'Algérie et pour le mouvement de mai 1968. Elle se poursuit sous d'autres formes avec des albums comme La Commune en chantant, Poèmes et chants concentrationnaires, un disque sur Bruant... Elle se double d'un riche répertoire de chansons gouailleuses, drôles ou nostalgiques (Faut vivre, Toi tu vas faire ta vie...) dans lesquelles l'angoisse et l'horreur de la mort sont apprivoisées par la générosité d'une voix chaude, indolente et fraternelle. On lui décerne en 1974 le prix Charles-Cros.

— Michel P. SCHMITT

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Michel P. SCHMITT. MOULOUDJI MARCEL (1922-1994) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )