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LACARRIÈRE JACQUES (1925-2005)

Né à Limoges en 1925, Jacques Lacarrière passe son enfance à Orléans « dans un tilleul au milieu d'un jardin », écrit des poèmes et étudie le grec au lycée. Il parcourt à pied la Sologne, pays du Grand Meaulnes. Alain-Fournier sera le seul auteur français auquel il consacrera un essai (1991). Son existence est très vite marquée par deux passions : l'errance, qui vise à « s'enraciner dans l'éphémère », et l'écriture qui transmet cet éphémère à travers le temps.

Jacques Lacarrière découvre la Grèce en 1947 avec le Groupe du théâtre antique et arrive en octobre 1950 au mont Athos. Il y fait l'épreuve de la solitude monastique et de la spiritualité orthodoxe. Pendant ses séjours, il tient un journal illustré de dessins, de poèmes et de photographies. Mont Athos, montagne sainte (1954), offre une large place à l'image. Il publie en 1957 une traduction d'Hérodote, qu'il compare souvent à Henri Michaux, établissant ainsi un pont entre l'Antiquité et le monde contemporain. En 1960, il consacre un essai à Sophocle. Ce texte érudit manifeste le souci d'une formulation simple, capable de communiquer les mystères de l'univers, et pose des questions exigeantes : « Qu'est-ce qu'une vie d'homme pour les biographes antiques ? Avant tout, une suite de rapports – bons ou mauvais – avec les dieux. »

Avec Jean Vilar, il atteint le public du théâtre populaire et du festival d'Avignon, celui des ouvriers de Billancourt auquel il présente Antigone de Sophocle (traduction reprise par la suite pour le livre avec celles d'Œdipe roi et d'Œdipe à Colone, 1994). Cet intellectuel libertaire a découvert au mont Athos son intérêt pour les itinéraires mystiques. « L'engagement antisocial et la quête utopique » des ermites du désert le fascinent et font l'objet d'un essai, Les Hommes ivres de Dieu (1961). Il étudiera ensuite Les Gnostiques (1973).

Son existence est partagée entre la France et la Grèce : il voyage en autocar ou à pied, il séjourne à Patmos, « lieu rêvé pour oublier la fin du monde », où il poursuit son journal sans idée de publication. Il traduit La Vie légendaire d'Alexandre le Grand (1962) et les Fables d'Ésope (1965), mais aussi des auteurs modernes : Georges Séféris (1963) ou Yannis Ritsos (Grécité, 1968). Il met également en scène certains textes (Ajax de Sophocle au théâtre Récamier, 1963).

Le coup d'État des colonels, en 1967, marque la fin de ses séjours en Grèce. Jacques Lacarrière s'installe dans la maison familiale de Sacy, en Bourgogne, et entreprend en 1971, un voyage à pied à travers la France, de Saverne à Leucate. Il tient son carnet de notes : cahier d'exercices, sollicitation permanente de l'attention et du regard. Le temps de l'écrit n'est pas celui du voyage, et lorsqu'il rédige Chemin faisant (1973), il opère une véritable « transmutation du vécu et de la mémoire », en reconstruisant un itinéraire entrepris pour lui-même et non pour le livre.

C'est sur le même principe que Jacques Lacarrière reprend le journal tenu en Grèce. Citations, poèmes, récits se mêlent dans ce « travail d'exil », en harmonie avec la nature et la chaleur des rencontres. Dans L'Été grec (1976) c'est la voix d'un conteur qui résonne et décrit un pays de rêve. Dans ce voyage au rythme calme et sans exploits, l'écrivain met en œuvre l'idéal d'une génération qui aspire à une autre forme de vie, consciente sur le plan politique, libre de ses aspirations et proche de la nature.

Il livre ensuite Le Pays sous l'écorce (1980), « voyage initiatique et chamanique au cœur du monde animal », prose pleine de bruissements, d'odeurs et de formes étranges. Sourates (1982) et Errances (1983), exercices poétiques du quotidien, sont[...]

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Aliette ARMEL. LACARRIÈRE JACQUES (1925-2005) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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