NIJINSKI VASLAV (1889-1950)
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Les années d'apprentissage
Fils cadet de Tomasz Lavrentievitch Nijinski (1862-1912) et d'Eleonora Nicolaievda Bareda (1856-1932), danseurs polonais, Vaslav Fomitch voit le jour le 12 mars 1889 à Kiev, en Ukraine. Mais sa naissance n'est officialisée que le 12 décembre 1889 à Varsovie, lors de son baptême catholique. De son père brillant interprète, Vaslav hérite des hautes pommettes et des yeux en amande, indices d'une origine tatare, ainsi que de la virtuosité et de la prodigieuse faculté de « bondir », également transmise à sa jeune sœur, la danseuse et chorégraphe Bronislava Nijinska (1891-1972). De sa mère, il prendra la douceur et la tendresse vulnérable. À l'âge de six ans, il est affecté par la chute de son frère aîné Stanislas (1886-1917) qui, tombé d'une fenêtre, ne recouvrera jamais la raison et sera interné dans un hôpital psychiatrique. Après une période d'errance foraine à travers la Russie, durant laquelle Nijinski apprend les bases de la technique classique, sa mère, qui s'est séparée définitivement de son mari en 1897, se fixe avec ses deux plus jeunes enfants à Saint-Pétersbourg. Vaslav est admis en 1898 comme élève à l'École impériale de danse, où sa sœur entre en 1900, date à laquelle il obtient la bourse d'étude Charles Didelot. Il suit les cours de Serge et Nicolas Legat. En 1902, il devient l'élève de Mikhaïl Oboukhov qui, malgré le mutisme de l'adolescent, pressent son génie et le protège des agressions de ses camarades jaloux. À l'exception de David Copperfield de Charles Dickens et de L'Idiot de Fiodor Dostoïevski, Nijinski aime peu les livres. Il a l'oreille musicale, joue du piano et de la flûte. En 1905, il accueille avec réserve la démonstration de danse libre donnée à l'École impériale de danse par Isadora Duncan, dont il appréciera plus tard les innovations. Interprétant un faune, il participe, la même année, à la création d'Acis et Galatée de Michel Fokine – premier contact avec le chorégraphe avec lequel il va brillamment s'illustrer. En 1906, Oboukhov donne à son meilleur élève, déjà remarqué dans le rôle du mulâtre énigmatique du Roi Candaule de Marius Petipa, l'occasion de se distinguer en dansant dans Don Giovanni de Mozart un pas de huit avec des artistes consacrés – Olga Preobrajenska, Lubov Egorova, Agrippina Vaganova, Adolph Bolm – et avec comme partenaire Vera Trefilova puis Anna Pavlova. Après son brillant concours de sortie au Mariinski, le 29 avril 1907, Nijinski est félicité par la ballerine Mathilde Kchessinska qui lui propose de devenir son partenaire. Peu après, il danse avec elle devant la cour impériale à Krasnoïe-Selo. Désormais, il est connu à Saint-Pétersbourg, où il enseignera à la bonne société les danses de bal, tout en suivant pour sa part, chez Anna Pavlova, les cours privés du maître italien Enrico Cecchetti.
Bien qu'il ne soit encore que coryphée, il tient déjà des rôles de soliste dans Paquita de Marius Petipa La Fille mal gardée d'après Dauberval, le pas de deux villageois dans Giselle de Jules Perrot (musique d'Adolphe Adam). Il est l'Oiseau bleu de La Belle au bois dormant de Petipa (musique de Piotr Ilitch Tchaïkovski), crée le rôle de l'esclave favori dans Le Gobelin animé, esquisse du Pavillon d'Armide de Michel Fokine sur une musique de Nicolas Tcherepnine. Au studio, le peintre Alexandre Benois est surpris par sa figure blême qu'illumine son regard, son long et large cou, ses chevilles et ses jambes épaisses, sa petite taille trapue, son manque d'éclat. Par la suite, son étonnement sera partagé par les admirateurs du danseur. Lors des répétitions, celui-ci se contente d'exécuter les pas, il ne s'abandonne pleinement aux rôles et ne se transfigure de façon stupéfiante qu'en scène, au contact du public. En 1908, sous la direction de Fokine, Nijinski incarne tour à tour l'esclave amoureux d'Une nuit d'Égypte (musique d'A. S. Arenski), une œuvre qui sera reprise à Paris en 1909 sous le titre de Cléopâtre, puis le poète romantique de Chopiniana, première version des Sylphides (musique de Chopin, décor et costumes de Léon Bakst). Son protecteur, le prince Pavel Lvov, le présente alors à Serge Diaghilev qui, après le succès qu'ont rencontré à Paris les saisons de musique et d'opéra russes, prépare active [...]
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Écrit par :
- Marie-Françoise CHRISTOUT : docteur d'État ès lettres, conservateur honoraire à la Bibliothèque nationale de France, écrivain et critique
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Pour citer l’article
Marie-Françoise CHRISTOUT, « NIJINSKI VASLAV - (1889-1950) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 23 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/vaslav-nijinski/