PROTECTION DE LA NATUREMesures de conservation des espèces
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Les mesures légales
Les listes rouges
Actuellement, deux organisations internationales définissent le statut des espèces animales et végétales du globe :l'U.I.C.N. (Union internationale pour la conservation de la nature, devenue Union mondiale pour la nature), qui s'occupe de toutes les espèces, et la Convention sur le commerce international des espèces en danger (C.I.T.E.S.).
Une des plus belles tortues terrestres : la tortue rayonnée (Asterochelys radiata), vivant à l'état sauvage exclusivement à Madagascar et menacée par le commerce international.
Crédits : Konrad Wothe/ Minden Pictures/ Biosphoto
Le système actuel de classification des espèces en danger s'est développé à partir de l'usage des livres ou listes rouges de l'U.I.C.N. (Baillie et al., 2004). Au début des années 1960, le rôle de ces documents était de fournir l'information sur la distribution géographique des espèces en attirant l'attention sur celles qui se trouvaient menacées. Avec le temps, les livres rouges commencèrent à dégager des priorités et à classer les espèces par ordre croissant de besoins de conservation, en distinguant des espèces « en danger », « menacées » ou « vulnérables », selon le niveau de risque. Les résultats sont satisfaisants, au moins pour les oiseaux et les mammifères. En revanche, plantes et invertébrés furent moins bien répertoriés, et cette lacune entraîna certains biologistes à suggérer que l'on devrait plutôt concentrer les efforts sur la conservation des peuplements et des écosystèmes en danger. Ainsi, certains pays ciblent désormais leurs lois sur la protection des milieux.
De nombreux États ont utilisé le modèle des listes rouges pour définir leurs propres approches de la protection des espèces en danger. Utile en général, ce système a pu occasionnellement provoquer des bévues. En particulier, une espèce à vaste répartition et en pleine vitalité est parfois perçue comme rare, parce que considérée dans un pays situé en bordure de son aire géographique. L'avocette et le balbuzard pêcheur en sont d'excellents exemples. Depuis 1950, ces deux espèces ont recolonisé la Grande-Bretagne, où des naturalistes avisés ont soigneusement gardé leurs nids et suivi leurs populations. Ainsi, ces deux espèces ont inspiré une attention conservationniste croissante, bien qu'aucune ne fût en danger à l'échelle planétaire.
Autre problème : les listes rouges donnent la plus grande importance aux espèces hautement menacées, lorsque l'espoir d'une protection efficace au moment de leur inscription est mince. Peut-être serait-il préférable, par souci d'efficacité, de privilégier les espèces pour lesquelles une chance raisonnable d'échapper à l'extinction existe.
Environnementalistes, juristes et politiciens demandent des moyens – scientifiques et politiques – plus acceptables pour déterminer si une espèce est en danger. Les tentatives légales pour protéger des espèces en danger se heurtent souvent à l'insuffisance de données scientifiques. De fait, on connaît si peu de chose sur la grande majorité des espèces – et moins encore sur leurs rôles dans le fonctionnement des écosystèmes – qu'on se trouve confronté au dilemme suivant : créer des lois pour sauver toutes les espèces possibles ou bien privilégier quelques-unes d'entre elles qui, exigeant de grandes étendues d'habitat, opèrent en tant qu'« espèces parapluies ». Légiférer à propos de telles espèces revient à en protéger du même coup une multitude d'autres, relativement inconnues, qui partagent le même milieu. La protection de la chouette tachetée du nord-ouest des États-Unis donne un exemple de cette stratégie.
La chouette tachetée septentrionale (Strix occidentalis caurina) habite les forêts de pins Douglas du nord-ouest des États-Unis. Ces forêts sont qualifiées de « vieilles » parce que beaucoup de leurs arbres sont multicentenaires, encroûtés de lichens et autres petites plantes épiphytes, qui contribuent à former une canopée complexe. Pendant des décennies, les amateurs d'oiseaux avaient repéré cette espèce comme un résident peu commun de ces forêts du nord-ouest des États-Unis, mais à peu près rien d'autre n'était connu sur elle jusqu'à la fin des années 1960. En 1967, un étudiant de l'université d'État de l'Oregon enregistra les chants de la chouette et put cartographier la distribution de l'espèce dans l'Oregon ; son travail révéla que la chouette tachetée vivait exclusivement dans les vieilles forêts de la côte nord-ouest des États-Unis. Il montra que chaque couple demande un domaine v [...]
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Écrit par :
- Robert BARBAULT : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, directeur du département écologie et gestion de la biodiversité, Muséum national d'histoire naturelle, Paris
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Pour citer l’article
Robert BARBAULT, « PROTECTION DE LA NATURE - Mesures de conservation des espèces », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 18 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/protection-de-la-nature-mesures-de-conservation-des-especes/