PROGRAMME GÉNÉTIQUE
Exemple de différenciation contrôlée par le contexte extracellulaire
L'exemple de la différenciation musculaire nous oblige à comprendre pourquoi seuls les myoblastes expriment les facteurs de transcription MyoD1 et Myf5. Il faut donc remonter une étape en amont pour expliquer comment se différencient ces précurseurs de la myogenèse.
Chez l'œuf de crapaud Xenopus laevis, dont nous avons déjà parlé, on observe une dissymétrie de composition moléculaire du cytoplasme entre le pôle animal, qui s'oriente sous l'effet de la gravité vers le haut, et le pôle végétatif. Il en résulte que les cellules qui se forment par division de cet œuf n'héritent pas toutes du même cytoplasme. Ainsi, dès leur formation, ces cellules sont différentes, bien que leur génome ne se soit pas encore exprimé : il ne commencera à le faire qu'à la fin de la segmentation. Si l'on dissocie artificiellement les cellules de l'embryon très jeune du Xénope et si on les place dans un milieu de survie, celles-ci vont se différencier de façon autonome, mais uniquement en deux types cellulaires : en cellules ectodermiques (qui donneront naissance aux cellules nerveuses et aux cellules épidermiques) et en cellules endodermiques (qui donneront l'appareil digestif). Aucune cellule ne se différenciera, dans ces conditions, en cellules mésodermiques, dont sont dérivées les cellules musculaires. Les cellules mésodermiques ne peuvent se former que secondairement, à partir des cellules ectodermiques, et uniquement si celles-ci sont en contact avec des cellules endodermiques. On appelle ce phénomène l'« induction mésodermique ». Pour que les cellules mésodermiques soient induites à se différencier, il faut et il suffit que l'ectoderme soit localisé à proximité de l'endoderme, sans cependant qu'un contact direct soit nécessaire. Cela indique que le ou les facteurs inducteurs sont des molécules solubles produites par les cellules de l'endoderme. Il a été démontré que ces inducteurs sont deux facteurs de croissance, le FGF et le TGFβ. Ces deux molécules sont excrétées dans le milieu par les cellules endodermiques et sont reconnues et « captées » par les cellules ectodermiques, grâce à la présence à leur surface de récepteurs spécifiques. Lorsque ces récepteurs ont lié leur facteur de croissance, il s'ensuit une cascade de réactions biochimiques intracytoplasmiques, principalement des phosphorylations, qui conduisent à une modification d'expression de certains gènes. Il est clair dans cet exemple que la différenciation mésodermique implique un programme qui n'est génétique qu'en partie. Interviennent deux types de facteurs épigénétiques : l'héritage d'une composition cytoplasmique élaborée dans et par l'ovocyte et l'intervention de molécules présentes dans le microenvironnement car synthétisées et excrétées par une autre catégorie cellulaire voisine (fig. 4).
Pour nos abonnés, l'article se compose de 9 pages
- 1. Le transfert d'information génétique au sein de la cellule
- 2. Rôle des facteurs de transcription
- 3. Autres niveaux de régulation de l'expression des gènes
- 4. Exemple de différenciation contrôlée par le contexte extracellulaire
- 5. Le programme de développement d'un organisme entier
- 6. Les modifications du programme
- 7. L'ambiguïté de la notion de programme
- 8. La reprogrammation
- 9. Bibliographie
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Corinne ABBADIE : docteur en biologie du développement de l'université de Paris-VI, maître de conférences à l'université Lille I
Classification
Pour citer cet article
Corinne ABBADIE, « PROGRAMME GÉNÉTIQUE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :
Média
Autres références
-
BIOLOGIE - La biologie moléculaire
- Écrit par Gabriel GACHELIN
- 40 721 mots
- 8 médias
On peut en conclure qu'un gène, au sens classique du terme, n'a de sens biologique qu'en tant qu'il est l'un des composants duprogramme génétique dans lequel il est inclus : la codification moléculaire de la génétique du développement des organismes métamériques (cf. développement) dépend[...] -
BIOLOGIE - La contruction de l'organisme
- Écrit par Françoise DIETERLEN
- 13 655 mots
- 1 média
[...]Gehring et ses collaborateurs y découvrent, à Bâle, en 1984, une séquence conservée qu'ils appellent l'homéodomaine. On démontre chez la drosophile que les gènes homéotiques (dont l'homéobox diverge peu de celle d'Antennapédia) sont distribués séquentiellement sur le même chromosome, qu'ils[...] -
CERVEAU HUMAIN
- Écrit par André BOURGUIGNON, Cyrille KOUPERNIK, Pierre-Marie LLEDO, Bernard MAZOYER, Jean-Didier VINCENT
- 70 297 mots
- 9 médias
-
DÉVELOPPEMENT (biologie) - Le développement animal
- Écrit par Marc-Yves FISZMAN, Thomas HEAMS, Lieba LAZARD, Andras PALDI, Alain PRIVAT, Patricia SIMPSON
- 89 189 mots
- 10 médias
Quel est le programme qui ordonne et coordonne le développement de cet organisme ? Ce programme dépend de l'information contenue dans les gènes constitués par de l'acide désoxyribonucléique (ADN) et rassemblés dans les chromosomes. Toutes les cellules de l'embryon et de l'organisme adulte[...] -
DÉVELOPPEMENT (biologie) - Le développement humain
- Écrit par Jacques-Michel ROBERT
- 61 220 mots
- 10 médias
- Afficher les 12 références
Voir aussi
- MATURATION DE L'ARN
- PROMOTEUR, biologie moléculaire
- RÉCEPTEURS NUCLÉAIRES, biochimie
- MÉSODERME
- ECTODERME
- ENDODERME, embryologie animale
- ŒUF
- HÉRÉDITAIRES MALADIES ou MALADIES GÉNÉTIQUES
- CYTOPLASME
- CAENORHABDITIS ELEGANS
- APOPTOSE
- NOYAU CELLULAIRE
- NUCLÉOTIDES
- ARN MESSAGER ou ARNm
- ARN POLYMÉRASE
- RÉPRESSEUR, biologie moléculaire
- TRANSCRIPTION, biologie moléculaire
- TRADUCTION, biologie moléculaire
- GÉNOME PLASTICITÉ DU
- ACTIVATION, biologie
- RECOMBINAISON HOMOLOGUE, génétique moléculaire
- MYOBLASTE
- INDUCTION EMBRYONNAIRE
- CELLULES SOUCHES
- GÉNOME
- BIOLOGIE MOLÉCULAIRE
- TUMEUR MALIGNE
- HISTONES
- TRANSPOSITION, biologie moléculaire
- ANTICORPS
- ÉPISSAGE ALTERNATIF ou ÉPISSAGE DIFFÉRENTIEL, génétique moléculaire
- CHROMOSOMES
- CHROMATINE
- PROTÉINES BIOSYNTHÈSE DES
- RECOMBINAISON GÉNÉTIQUE
- IMMUNOGLOBULINES
- RÉGULATION GÉNÉTIQUE
- EXPRESSION GÉNÉTIQUE
- EXON
- INTRON
- NUCLÉOSOME
- EMPREINTE PARENTALE, génétique
- DIFFÉRENCIATION CELLULAIRE ou CYTODIFFÉRENCIATION
- EMBRYOGENÈSE ANIMALE
- MESSAGER, biochimie
- NUCLÉOTIDIQUE SÉQUENCE
- GÉNÉTIQUE MOLÉCULAIRE
- ONCOGÈNES
- PROTÉINES
- RÉCEPTEURS MEMBRANAIRES
- TRANSGENÈSE
- FACTEURS DE CROISSANCE
- ÉPISSAGE, génétique moléculaire
- RÉARRANGEMENT GÉNIQUE
- MÉTHYLATION, biologie moléculaire
- SQUELETTIQUES MUSCLES
- TRANSPOSON
- ENHANCER
- ANIMAUX TRANSGÉNIQUES
- CLONAGE ANIMAL
- RÉTROTRANSPOSON
- REPROGRAMMATION CELLULAIRE
- BASES NUCLÉIQUES ou BASES AZOTÉES
- GURDON JOHN B. (1933- )